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  • Photo du rédacteurNathalie986

Chapitre 3 - Une semaine de réflexion

Cendre et la Vallée Oubliée


La première chose que fit Cendre fut d’aller ramasser de l’ail. Cette plante qu’elle adorait était désormais devenue un sauf-conduit lui permettant de se déplacer tranquillement dans la vallée. Et dire qu’elle lui devait la vie !


Elle avait essayé de pêcher mais l’eau du lac était tellement gelée qu’il lui avait été impossible de lancer une ligne. De toute façon, elle n’était pas certaine d’être très douée pour ça.


Elle avait alors sillonné la bourgade et ramassé plusieurs plantes locales. Elle avait aussi cueilli les fruits d’un arbre assez étrange et dont le goût était vraiment particulier. Cela l’avait presque rendue malade.

Elle conserva tout de même sa récolte, se persuadant qu’elle intéresserait peut-être quelqu’un.


Durant deux jours, elle avait cherché des moyens de se faire de l’argent et la chance lui avait souri devant l’entrée d’une grotte condamnée lorsqu’elle trouva un marteau et un burin abandonnés sur le sol.


Elle s’était alors attaquée à cette roche cristalline qui se trouvait là, dans l’espoir d’y extraire un peu de cristal et sa patience fut récompensée lorsqu’un joli cristal rose se détacha de la pierre. Elle en tirerait sûrement un bon prix dans ces fameuses catacombes qu’elle n’avait pas encore trouvées.


Cendre s’astreignit cette semaine-là à dormir la journée au soleil. Elle dormait peu, et par étapes, car il faisait tout de même très froid, mais elle savait que si elle s’endormait la nuit, elle risquait de ne jamais se réveiller tant les températures étaient glaciales.


Le deuxième jour, elle s’essaya au jardinage mais sans plus de succès que pour la pêche.

Elle avait tenté de creuser la terre avec son marteau mais, sous la neige, il y avait une épaisse couche de glace impossible à casser. Il lui faudrait attendre des jours meilleurs pour essayer de planter quelque chose à nouveau.


Evidemment, la pêche et le jardinage n’étaient pas ses points forts. Son point fort à elle, c’était la peinture.

Oba-san rigolerait bien s’il la savait coincée ici à creuser la terre et la roche avec ses mains d’artiste...

La voix de Lilith la ramena soudain à la réalité. Que venait faire cette fille ici ? Ne pouvait-elle pas la laisser tranquille dans sa galère ?


Cendre était furieuse. Elle s’avança vers l’intruse, folle de rage.

- Toi ? Qu’est-ce que tu viens faire ici ? Sors de chez moi !

- Chez toi ? Ce grand terrain vide !


- Tu t’es bien foutue de moi en me laissant des savates en guise de chaussures !

- Je savais que tu apprécierais !


Le ton railleur de Lilith la mit hors d’elle :

- Alors écoute-moi bien, Vampirette ! Je ne m’amuse pas ici, je survis et j’ai froid. Je me tue à la tâche pour trouver des bricoles à vendre ou à échanger dans les catacombes et je suis épuisée ! Et toi ? Toi, tu débarques avec ton gros pull confortable pour me narguer ? Fiche-le camp, tu me dégoûtes !


Cendre s’attendait à ce que la brune lui sautât dessus mais, à sa grande surprise, elle changea de ton et s’excusa.

- D’accord, désolée. C’est vrai que j’ai un peu exagéré avec cette histoire de sandales. Mais je suis venue pour t’aider cette fois.


- Et pourquoi m’aiderais-tu ?

- Je te propose de te conduire aux catacombes. Je sais que tu as déjà pas mal de petites choses à vendre et ce sera plus sûr si tu es accompagnée. Tu es partante ?

Bien que méfiante envers Lilith, Cendre accepta tout de suite. Après tout, elle n’avait toujours pas trouvé comment accéder à cette ville souterraine.


L’entrée des catacombes correspondait à l’entrée de cette grotte que Cendre avait cru condamnée lorsqu’elle avait trouvé son marteau.

Elle aurait dû se douter, en voyant toutes les chauves-souris qui rodaient autour, que cela cachait autre chose.

Cendre obtint trois-cent-dix-neuf simflouz en vendant ses trouvailles et ses récoltes. C’était une belle somme mais elle ne lui permettait pas encore de se payer le chevalet qu’elle avait aperçu dans une des boutique.


A leur retour à l’air libre, Lilith l’entraîna dans une partie d’échecs et Cendre en profita pour lui poser quelques questions sur le fait qu’elle ne voyait jamais personne dans les rues de Forgotten Hollow.

- La ville est pourtant accessibles de l’extérieur...

- Elle l’est. Mais le Comte a mandaté des gardiens à chaque accès de la ville pour intercepter les indésirables. Il ne veut pas que tu puisses t’entretenir avec un humain durant ta semaine de réflexion.

- Ben voyons ! Je croyais que les vampires ne supportaient pas le soleil. Comment font-ils pour surveiller les entrées durant la journée ?

- C’est une légende, tout ça ! Certains vampires supportent très bien le soleil. C’est mon cas et celui de mon frère. D’autres, comme le Comte, le craignent énormément.

- Et les humains qui entrent ici, qu’en faites-vous ?

- Je crois que tu le devines très bien sans que je n’aie à te le dire.


Lilith s’en alla lorsque la nuit tomba, laissant Cendre seule au milieu de son terrain inhospitalier, sans même un toit sur la tête.

Elle avait froid et faim. Elle grignota quelques fleurs d’aconit et un peu d’ail mais cela ne la rassasia pas longtemps...


Caleb, le frère de Lilith était alors apparu devant elle, surgi de nulle part et la faisant sursauter. Son visage était amical et il la pria de venir passer la nuit dans sa maison. Il lui fit miroiter un bain chaud, un vrai repas et un bon lit.

Bien qu’elle trouvât la proposition très tentante, Cendre déclina l’invitation. Le diable n’avait-il pas plusieurs visages ? Elle n’avait absolument aucune confiance en cet homme qu’elle n’avait que vaguement aperçu une seule fois. Et elle n’oubliait pas qu’il avait envisagé de faire d’elle un bon festin.


Cendre regretta cependant très vite le départ de Caleb car plus la nuit avançait et plus elle avait froid, faim et sommeil. Or, elle ne pouvait pas se permettre de s’endormir avec le froid qu’il faisait. Elle décida qu’elle devait s’activer et partir à la recherche de nouvelles plantes. Cela la maintiendrait éveillée.


Si elle s’était un instant imaginé qu’elle pourrait aller contre son corps en détresse, elle constata à ses dépens que celui-ci la rappelait à l’ordre.

Ses forces l’abandonnèrent sans prévenir et elle tomba d’épuisement face contre terre, devant le regard médusé de Caleb Vatore qui était revenu pour s’assurer qu’elle n’avait pas changé d’avis.


- Relevez-vous, Cendre, enfin ! Ce n’est pas une position convenable pour une demoiselle !


Elle s’était relevée péniblement pour constater que le regard de Caleb n’était ni moqueur, ni malveillant. Le timbre de sa voix, non plus.

- Alors, tenez-vous réellement à passer la nuit ici ?


Cendre l’avait suivi jusque chez lui. Elle ne se sentait vraiment pas bien mais l’urgence était de se nourrir et Caleb l’avait compris.

Lorsque Cendre lui demanda ce qu’il advenait des humains qui pénétraient dans la Vallée, Caleb fut un peu plus explicite que sa sœur. Il donna à la jeune femme des détails qu’elle aurait préféré ne pas connaître mais elle l’avait bien cherché. Lorsqu’on ne veut pas connaître la réponse, on ne pose pas la question.

Quand elle eût fini son assiette, il l’accompagna jusqu’à sa chambre, lui passa un t-shirt et un short appartenant à Lilith, et se retira.


Elle dormit d’un sommeil sans rêves et fut réveillée au petit matin par le son de l’orgue. Tout comme la première fois qu’elle l’avait entendue, elle trouva la mélodie merveilleuse.

Elle descendit doucement l’escalier et, sans faire de bruit, s’installa sur une chaise près de Caleb. Elle ne voulait surtout pas interrompre la magie de l’instant.


Le quatrième jour, Cendre avait réuni assez d’argent pour s’offrir son chevalet.

Lilith l’accompagnait chaque fois qu’elle devait se rendre dans les catacombes et, son frère et elle lui avaient définitivement ouvert leur maison. Cendre y était la bienvenue chaque fois qu’elle ressentait le besoin de dormir, de manger ou de se laver.


Le reste du temps, elle le passait chez elle, sur son terrain vide en compagnie de son chevalet.

Elle avait peint plusieurs toiles dans la journée qu’elle comptait bien vendre à un bon prix.

Peindre lui avait aussi permis de pallier cet énorme manque de distraction qu’elle ressentait depuis qu’elle était arrivée dans la vallée.

Elle aurait presque pu être heureuse si le pacte de Vladislaus Straud ne venait pas hanter régulièrement ses pensées.


Contre toute attente, Lilith était sa plus grande admiratrice et elle venait régulièrement la regarder peindre. Elle aussi adorait la peinture et elle débordait d’enthousiasme devant chaque toile de Cendre, estimant chaque fois la valeur de l’œuvre.


Et elle se trompait rarement.

Le cinquième jour, Cendre avait gagné suffisamment de simflouz pour s’acheter une commode et deux petites lampes de sol, afin de pouvoir peindre le soir.

Cette nuit-là, elle était tellement absorbée par une toile qu’elle désirait absolument finir que Lilith avait dû lui rappeler que c’était l’heure du dîner. Il était déjà presque une heure du matin.


Mais en lieu et place du dîner, Lilith avait fait manger de la neige à Cendre qui ne s’était pas laissé faire. Une bataille de boules de neige avait alors eu lieu entre les deux femmes qui firent la paix autour de la création commune d’un bonhomme de neige.


Cendre découvrit cette nuit-là une autre facette de Lilith mais peut-être cette facette n’était autre que celle qu’ « on » lui avait ordonné de revêtir pour faire « amie-amie » avec l’humaine... Tant pis, ces jeux tout simples furent un exutoire salvateur à sa vie dans cette sombre vallée, une bouffée d’air pur.

- On n’est pas bien ici, Cendre ?

- Oh si, mais je vais être trempée !


Elles s’étaient alors retrouvées chez Lilith comme deux vieilles copines, à papoter mais malgré cela, Cendre ne perdait jamais de vue que la brune représentait avant tout un potentiel danger.

- As-tu décidé de ce que tu voulais faire ? La semaine se termine demain soir. Vas-tu accepter la transformation ?

- Je n’en sais rien... Vivre éternellement n’était pas dans mes projets. Et ton Comte semble trop bizarre à mon goût.


En gage d’amitié, Lilith lui offrit quelques vêtements chauds.

- Tu sais, nous sommes tous bizarres si tu vas chercher par là. C’est notre forme sombre qui veut ça. Un jour, je te montrerai la mienne.


Au petit matin, Cendre était retournée sur ses terres vêtue d’un pull, d’une casquette et d’une écharpe. Et surtout, elle avait les jambes et les pieds au chaud.

Caleb était venu lui apporter du bois. Il semblait sincèrement inquiet de la décision qu’elle allait prendre.

- Nous n’aimerions pas te voir trépasser, Lilith et moi...


- Crois-tu que j’ai envie de finir en festin pour l’un de tes congénères ?

- Si nous devions en arriver là, je m’en occuperais personnellement, sois rassurée. Tu ne sentiras rien. Ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi tu n’as pas encore pris de décision.

- Mourir humaine ou vivre vampire une éternité auprès du comte...


Cendre s’interrompit alors. Sa voix s’était brisée malgré elle, la montrant vulnérable, et elle avait peur de finir sa phrase en pleurant.

Caleb la laissa se ressaisir sans mot dire. Le silence s’installa entre eux durant quelques secondes avant qu’elle ne reprenne d’une voix désemparée :

- Aide-moi, Caleb. Qu’est-ce que je dois faire ?


- Tu me flattes en demandant mon aide mais toi seule doit décider. Il s’agit de ta vie. Je ne peux t’influencer en aucune manière.

Il entreprit alors de lui changer les idées puis lui proposa de l’emmener faire les boutiques pour vendre ses toiles et acheter de nouvelles choses pour son terrain. Ravie de pouvoir penser à autre chose, elle ne se fit pas prier.


Le lendemain, Cendre exigea de Caleb et Lilith qu’ils la laissassent seule.

A la tombée de la nuit, elle devrait informer le Comte de la décision qu’elle avait prise et elle avait besoin de se concentrer sur le bon choix à faire sans que personne ne vienne interférer dans ses réflexions.


Une chose était certaine, elle ne voulait pas mourir.

Peut-être que ce n’était pas si horrible que ça d’être un vampire. Caleb et Lilith avaient même l’air de très bien le vivre...


Et puis il y avait toujours cette fameuse potion à trouver. Elle pourrait alors se guérir elle-même en plus de guérir les autres...

Quant à son mariage avec le Comte, elle aurait le temps de voir venir...


Cendre était en train de peindre lorsque le comte arriva. Se yeux brillaient dans la nuit noire.

- Bonsoir, Demoiselle Valrose. Avez-vous pris votre décision ?


Elle lâcha ses pinceaux, manqua de s’oublier puis lui fit face.

- J’ai vraiment les chocottes, Monsieur le Comte, mais oui, je suis d’accord. Faites de moi un vampire.


Il lui sembla que le comte avait esquissé un sourire. Il lui tendit la main.

- Je me félicite de votre choix. Venez avec moi, nous allons au manoir.




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