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  • Photo du rédacteurNathalie986

Chapitre 11 - Une loyauté assurée

Cendre et la Vallée oubliée


Elle s’était réveillée ce matin-là, étrangement bizarre. Elle ne savait pas où elle était mais, pire que ça, elle avait oublié son nom et, pour ne rien arranger, une brûlure lancinante se faisait ressentir au niveau de son cou.

Elle se dirigea vers la salle de bain dont la porte était restée ouverte et s’empressa de soulager une envie diffuse mais bien réelle.


Puis elle s’observa dans le miroir. Elle avait deux traces de piqûres dans le cou. Que lui était-il arrivé ? En regardant son environnement, la jeune femme se dit qu’elle ne devait pas être bien riche.


Elle fila sous la douche. Cette odeur de transpiration était insupportable. Combien de temps avait-elle dormi pour sentir le bouc à ce point-là ? Elle ne se rappelait rien.


« Bon sang ! Mais pourquoi est-ce que je ne me souviens pas ? ».

Elle avait revêtu les vêtements qui se trouvaient là et avait relevé ses cheveux en chignon. Pourquoi ? Elle ne saurait le dire mais le geste lui était venu machinalement. Pourtant, devant ce miroir, elle ne se reconnaissait toujours pas.


Elle recoiffa alors ses cheveux comme ils étaient auparavant et décida d’aller jeter un œil à son environnement, mais lorsqu’elle voulut ouvrir la porte de sa chambre, elle découvrit que celle-ci était fermée à clé.

Elle tambourina alors de toutes ses forces pour se faire entendre.

- Ohé ! Il y a quelqu’un ?


Une femme blonde apparut alors, une femme qui semblait la connaître.

- Bonjour Jess, comment te sens-tu ?

Jess ? Alors, elle s’appelait Jess !

- Bonjour... Vous me connaissez ?


- Bien sûr que je te connais ! C’est quoi cette question ?

- Je ne me souviens pas... Je ne sais pas qui vous êtes, ni qui je suis non plus...


- Alors, ce qui t’est arrivé est bien plus grave que ce que je ne le pensais.

- Quoi ? Que m’est-il arrivé, Madame ?


La dame blonde, qui semblait sincèrement inquiète pour elle, la conduisit jusqu’à une cuisine accessible par de hautes portes surmontées de barbelés.

- Il faut que tu manges, lui avait-elle dit.


Elle semblait si prévenante. Elle lui servit une omelette et s’enquit de ses souvenirs :

- Cette cuisine ? Elle ne te rappelle vraiment rien, Jess ?

- Non... je suis désolée.


- Ce n’est pas grave. Nous ferons tout ce qu’il faut pour te rappeler qui tu es.

Comme elle était gentille ! Cette femme devait avoir une grande importance dans sa vie pour se soucier d’elle à point.

- Je te raconterai ta vie, Jess, tu verras. Tes souvenirs finiront par remonter à la surface.


Et elle la lui avait racontée. La dame blonde s’appelait Madame Valrose. Une nuit, il y a deux ans, elle avait retrouvé Jess blessée devant le pas de sa porte et elle l’avait recueillie sans aucune hésitation bien que Jess fut humaine...

- Comment ça, humaine ? Bien sûr que je suis humaine. C’est encore une des choses dont je sois sûre. Pourquoi ? Ce n’est pas votre cas ?


- Malheureusement, non. Je suis un vampire et toi, Jess, tu défendais notre cause. Tu savais que tous les vampires n’étaient pas mauvais et tu voulais le prouver au monde entier. Seulement, certains humains ne pensent pas comme toi et c’est pour cette raison que tu t’es retrouvée devant chez moi cette nuit-là. Ils voulaient te tuer pour te faire taire. J’avais confiance en toi, alors je t’ai hébergée.


- Cette histoire semble incroyable... surtout lorsque les marques que j’ai au cou me font penser à une agression de vampires.

- Evidemment ! Ils n’ont pas réussi à te tuer la première fois alors maintenant, ils font tout pour que tu doutes. Mais l’histoire est toute autre.

- Et quelle est-elle ?


- Elle est triste, Jess... Les humains ont toujours eu peur de nous alors que nous ne leur voulions pas de mal.

Madame Valrose expliqua, qu’à cause de cela, la Vallée Oubliée avait fermé ses portes, pour que le monde des humains et celui des vampires soient à tout jamais inaccessibles l’un pour l’autre. Mais le sort qui avait été jeté n’avait fonctionné que partiellement et les humains arrivaient encore à rejoindre La Vallée Oubliée pour ne plus jamais pouvoir en ressortir.


Madame Valrose prit soudain un air grave.

- Nous dûmes alors prendre une décision capitale pour assurer notre survie : tout humain qui se perdrait dans la vallée deviendrait pour nous un potentiel repas. Ce fut la seule décision raisonnable pour assurer la survie de notre race.

En décrivant sa nouvelle vie à Jess, Cendre savait que la réalité n’était pas bien loin de son invention.


- Et moi dans tout ça ? Qu’ai-je fait ? Ai-je cautionné tout cela ? Vous dites que nous étions amies, que je défendais votre cause... mais tout cela semble n’avoir aucun sens. Je n’aurais pas pu laisser mes semblables se faire tuer.


- Bien sûr que non ! Mais tu savais que nous n’avions pas le choix. Tu étais là quand nous avons pris notre décision et tu savais aussi que c’était la seule à prendre même si elle nous a tous déchirés. Tu t’es toi-même proposée pour rester à mes côtés afin de pouvoir alléger les souffrances des prisonniers. Nous n’avions pas le choix ! Essaye de t’en rappeler! C'était ta cause !


- Je n’arrive pas à m’en souvenir, je suis navrée.


Madame Valrose lui raconta aussi à quel point elle lui était dévouée. Elle lui parla du garde-manger et des géniteurs, de ces personnes dont Jess s’occupait avec prévenance au fil des jours, en cuisinant pour elles ou en leur rendant visite, simplement pour parler, parfois.


Madame lui racontait tout ce qu’elle pouvait pour l’aider à retrouver ses souvenirs. C’est ainsi qu’elle en vint à lui parler de son bébé, une petite Amandine qui devait rester près de son père et dont elle était privée à cause des traditions. Elle devrait attendre trois ans avant de savoir si cette petite poupée allait être vampire ou humaine et si, pour être plus crue, elle allait vivre ou mourir.

Il était vraiment tragique, le destin de Madame Valrose...


Elle lui apparut alors comme une femme extrêmement vulnérable, bien qu’elle soit un vampire, et sa vulnérabilité la rendit tout de suite plus sympathique à ses yeux. En voyant cette femme si préoccupée par le devenir de son enfant, elle sut que les vampires n’étaient pas si différents des humains que cela, et elle devina pourquoi, dans le passé, elle avait choisi de les soutenir.

- On ne tue pas les enfants, Madame Valrose ! On cherche une autre solution.


Jess avait alors vu se dessiner un sourire sur les lèvres de sa sauveuse.

- Mais oui, tu as raison ! Il y a toujours d’autres solutions.


- Bien sûr qu’il y en a d’autres. Je ne suis pas maman mais, s’il y a une chose dont je suis certaine, c’est que je ne pourrais pas tuer mon bébé.


Au cours de leurs nombreuses discussion, la jeune femme lui avait aussi appris qu’elle était une reine en mixologie et, qu’avant d’être amnésique, Jess lui donnait même des cours.

Puis elle lui avait raconté la vie des prisonniers humains dans ses cellules et expliqué combien la présence de Jess était nécessaire à leur bien-être car elle apportait de la douceur dans leurs vies, uniquement avec son sourire.


Jess avait alors pris la décision de reprendre son rôle de cuisinière auprès de ses semblables et assuré à Madame qu’elle continuerait à apporter ce bien-être qui avait l’air si cher à son cœur, et c’était tout à son honneur.

- Je me sens peut-être un peu patraque à cause de mon cou mais vos prisonniers seront aux petits soins avec moi.

- Je savais qu’on se comprendrait, Jess. Nous nous sommes toujours comprises. Et mon but est d’adoucir le calvaire de ces personnes.


Madame Valrose lui avait aussi signifié qu’elle ne pouvait pas appeler les prisonniers par leurs noms. C’était beaucoup trop compliqué pour elle car elle ne voulait pas s’attacher. Alors, elle leur avait donné des numéros et demanda à Jess de les nommer, elle aussi, ainsi.

- Aucun problème, Madame. Je comprends bien que ce doit déjà être assez dur comme ça lorsque vous devez vous en séparer. Ce sera sûrement pareil pour moi, alors je vais suivre votre conseil. En plus ce n’est pas toujours facile de se rappeler les noms de tout le monde.


En réalité, Jess se trouvait être quelqu’un ayant naturellement une bonne composition, et elle voulait faire plaisir à Madame. Elle ne savait pas pourquoi, mais elle sentait que c’était important pour elles deux.


Elle se sentait débitrice à tout jamais envers cette femme si attentionnée avec qui elle faisait même parfois des « soirées pyjama ». Cette femme était vraiment extraordinaire. Si elle ne l’avait pas su, elle n’aurait probablement jamais deviné qu’elle était un vampire.


C’est au cours d’une de leurs soirées « pyjama » que Madame Valrose lui apprit ce qui s’était passé le mois dernier, juste avant son amnésie.


Les humains qui en avaient après elle et son combat pour la race vampire, avaient fini par suivre ses traces dans la Vallée Oubliée, sans savoir qu’ils ne pourraient plus en sortir. Deux d’entre eux l’avaient attrapée et attaquée à coup de seringue amnésiante pour faire croire à une attaque de vampires.


- Une seringue amnésiante ?

- Ce sont des seringues à doubles têtes qui imitent les canines de vampire et qui ont pour effet d’annihiler les souvenirs de ceux qui sont touchés.


- Et c’est pour ça que je n’ai plus aucun souvenir ?

- On va tout faire pour que tu les retrouves. Et si ce n’est pas le cas, tu t’en créeras de plus beaux encore.


Jess voulut alors changer de sujet et demanda à Madame Valrose de lui reparler de son bébé et de cette fameuse et injuste tradition de la descendance. Elle sentait que cela lui faisait du bien de parler de sa fille.


Elle en parlait même très souvent.

- Et qu’allez-vous faire si elle est humaine ? Qu’allez-vous faire ?

- J’ai ma petite idée... mais ma fille ne souffrira pas.


- Quel genre d’idée, Madame ?

- Une idée qui ne regarde que moi pour le moment, Jess... Mais je t’en ferai part en temps voulu.

- Pourquoi m’appelez-vous toujours Jess, Madame Valrose ?


- Mais parce que tu t’appelles Jess ! C’est toi qui m’as dit que tu t’appelais ainsi.


- J’ai dû me tromper. Ne me demandez pas pourquoi mais je sens qu’il y avait un « i » dans mon prénom. Je dois m’appeler Jessie. J’en suis presque sûre.

- Et bien, soit. Je t’appellerai Jessie.


- Madame...

Jessie avait prononcé ce mot timidement.

- Croyez-vous que ces mauvais humains qui en ont après moi pourraient à nouveau me faire du mal et enlever les souvenirs que j’ai de vous ?

- Non, Jessie. Ils ne le pourront plus. Nous nous sommes occupés d’eux.


- « occupés d’eux » comme « vraiment disparus » ?

- C’est exactement ça, oui. Ils sont morts.


Madame Valrose était vraiment unique. Elle l’avait sauvée à deux reprises des griffes de ces humains malfaisants qui n’entendaient rien à la cause des vampires et voulaient les anéantir coûte que coûte, quitte à sacrifier une des leurs comme Jessie.


Alors Jessie devait la remercier. Elle savait ce qu’elle devait faire. Elle alla la trouver une nuit et lui jura loyauté et fidélité. Elle désirait plus que tout que les vampires puissent, eux aussi, avoir une vie heureuse, une vie qui ne soit pas entravée par les actions malfaisantes d’humains malveillants.

Elle continuerait donc le combat qu’elle avait mené jusque-là, même si elle ne s’en souvenait pas. Mais Madame Valrose en valait la peine, elle le sentait.





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