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  • Photo du rédacteurNathalie986

Chapitre 12 - Impitoyable tradition

Cendre et la Vallée Oubliée


Cendre était arrivée dans la Vallée Oubliée en 2020 et nous étions en 2025. Que de temps avait passé depuis ce jour où elle avait frappé, blessée, à la porte de Caleb et Lilith.

Mais elle s’en était bien sortie, la petite Cendre.


Voilà deux ans et demi qu’Amandine était née et, presqu’autant qu’elle avait ôté ses souvenirs à Jess, ou plus exactement à Jessie, pour lui inventer une nouvelle vie. Et ça fonctionnait plutôt bien.


Jessie avait redécouvert qu’elle savait cuisiner mais qu’elle n’aimait pas la viande. Pourtant, ça ne l’empêchait toujours pas d’en cuisiner pour les prisonniers, comme avant.

Elle restait égale à elle-même, enjouée, serviable et proche des autres, telle que Cendre l’avait connue au début.


Mais, à la différence de son ancienne vie, elle soutenait maintenant sa maîtresse à cent pour cent tout en continuant à s’entretenir gaiement avec ses prisonniers.

Elle avait même demandé à Cendre une tenue de servante pour aller leur donner à manger.

« Ils verront tout de suite que je ne suis pas de leur côté, comme ça ! ». C’était discutable mais c’était la logique de Jessie et Cendre avait bien ri avant de lui accorder cette faveur. C’est Bella qui lui dégota une tenue de servante ainsi que d’autres vêtements.


Oui, Jessie prenait son rôle très au sérieux et veillait au bien-être quotidien des prisonniers. Elle avait même entrepris de faire le ménage dans leurs cellules, tâche que Cendre avait toujours rechigné à faire. Une vraie fée du logis.


Elle s’occupait aussi régulièrement d’Amandine lorsque Dirk vaquait à « d’autres occupations » importantes, et elle ne manquait jamais de raconter à Madame, les derniers sourires de sa fille.


Cendre ne s’inquiétait pas. Elle allait régulièrement s’assurer que la cohabitation entre Dirk et sa fille se passait bien et elle savait depuis très longtemps que la star mondiale s’était découvert une passion pour ce petit être qu’ils avaient en commun.


Et cela avait d’autant plus de valeur que Dirk ne se savait pas observé. Elle aurait tellement voulu être à sa place et pouvoir tenir leur fille qu’elle aimait tant dans ses bras.

Mais la tradition était implacable et elle ne devait pas faillir.


Deux ans et demi... Que le temps passait vite ! Voilà bien longtemps que Cendre avait pris la décision d’enlever tout l’ail qui servait de décoration à la maison de Lestat (un an, peut-être deux...). Peut-être lui en voudrait-il un jour mais elle n’avait pas eu d’autre choix pour continuer à venir le voir régulièrement et avec tout cet ail, elle aurait pu mourir.


Elle avait aussi pris la décision d’enterrer la pauvre victime de Lestat dans son jardin. L’urne ne pouvait pas rester indéfiniment au milieu de son salon.


Elle allait le voir tellement souvent son Lucas. Le vapeurs violettes qui sortaient de son cercueil la rassuraient chaque fois et elle lui racontait alors sa vie : le Comte, Jess, devenue Jessie, ses amis Lilith et Caleb ou encore Francis et Bella, et les prisonniers. Et puis surtout, Amandine.


Deux ans et demi. Cendre avait adoré ce jour où Jessie s’était souvenu d’avoir des talents de mixologue. Elle paraissait tellement heureuse.


- Je crois que je m’en rappelle, Madame ! Je m’en souviens même très bien ! Mes souvenirs vont revenir, je le sens !

- Ne te l’avais-je pas dit, Jessie ?

Cendre savait pourtant que ses souvenirs principaux ne reviendraient pas, ceux qui concernaient directement les personnes qu’elle avait connues, à moins qu’elle-même ne les lui rende. Et tant mieux ! C’était un tel plaisir de la voir ainsi que son amnésie en valait la peine.


Deux ans et demi... Il était grand temps pour Cendre d’envisager sérieusement l’avenir d’Amandine, qu’elle soit vampire ou humaine.


Cette nuit-là, elle avait retrouvé son amie Bella à l’entrée des catacombes.


Les deux femmes s’étaient alors entendues sur un sujet qui ne concernaient qu’elles, un secret qui ne devrait jamais être révélé. Cendre savait qu’elle prenait des risques mais elle avait décidé de tout miser sur Bella.


Son amie avait d’ailleurs voulu s’assurer qu’elle ne divaguait pas et lui avait fait répéter trois fois ce qu’elle venait dire. Elle non plus ne voulait pas prendre de risque, et les risques allaient être énormes dans cette affaire.


Lorsque Bella eut la garantie que le marché serait honnête et aussi dangereux pour elle que pour sa maîtresse, elle en accepta toutes les conditions.


- Personne ne le saura jamais, n’est-ce pas ?

- Bella... Tu viens de dire oui et si tu l’as dit, c’est que tu as confiance en moi. Alors non, personne ne le saura jamais.


Personne sauf peut-être Lestat car Cendre alla lui confier leur petit secret, une décision bien inoffensive après tout puisque Lucas ne pourrait rapporter les termes de cet accord interdit à personne.


 

Six mois plus tard, février 2026. Numéro douze s’en alla suivi de près par numéro dix. Alors qu’ils s’éteignirent d’épuisement, comme tous les autres, seule numéro onze avait l’air de résister.

(Rappel : Numéro dix, c’est Eliza Pancakes et numéro onze Dina Caliente)


Ce même jour, Jessie réveilla sa maîtresse.

Elle pouvait dorénavant circuler librement dans les appartements de Madame mais avait interdiction de se rendre au-delà de la chapelle sous peine d’être confrontée à des vampires affamés.


- Votre fille a trois ans aujourd’hui, Madame ! C’est pour cela que je me suis permise de vous réveiller.


Cendre avait tenu à être auprès de sa fille ce jour-là et Jessie le savait. La petite Amandine était mignonne comme tout avec les yeux clairs de sa mère et les cheveux crépus de son père mais... elle était humaine.

Cendre devrait se séparer d’elle. La vie n’était pas toujours facile et l’éternité encore moins.


Jessie était abasourdie. Après toutes ces discussions qu’elles avaient eues toutes les deux et où Madame se dévoilait attachée à sa fille, elle allait quand même mettre fin à la vie de sa fille ! Elle n’en croyait pas ses oreilles.


Pourtant, elle avait bien vu ce baiser que sa maîtresse avait déposé sur le front d’Amandine, ce signe d’infinie tendresse qui lui avait fait espérer que l’avenir de la petite fille serait tout autre et que les traditions iraient au diable.


Mais Madame avait déposé la bambinette en lui disant :

- Je dois te dire au revoir, je n’ai pas le choix.

Et Jessie avait préféré quitter la pièce pour ne pas vivre les minutes qui allaient suivre.


Mais les minutes qui suivirent furent bien silencieuses et Jessie n’entendit rien depuis sa chambre.

Cendre regarda tristement la petite Amandine :

- Mais avant de te dire au revoir, nous allons nous promener, toi et moi.

Et Cendre fit ce qu’il y avait à faire.


Jessie, elle, s’effondra sur son lit, recroquevillée comme un fœtus. Madame avait dû trouver une solution pour ne pas faire souffrir la petite mais comment avait-elle pu accepter la tradition et être si insensible ?

Elle avait pourtant cru en elle et en sa capacité à pouvoir faire vivre son enfant.


Elle y avait tellement cru... La petite Amandine... Elle l’avait serrée dans ses bras... et elle-même, simple servante, l’aimait déjà comme sa fille. Pourquoi ces maudites traditions vampiriques existaient-elles ?


Quelques heures après l’anniversaire de sa fille, lorsque la nuit tomba, Cendre passa beaucoup de temps à arranger un endroit agréable afin de se souvenir d’Amandine.


Puis elle s’était occupée de donner une sépulture à numéros dix et douze, l’anniversaire de sa fille ne lui ayant pas permis de s’en soucier avant.


Vladislaus s’était alors invité dans la chapelle et elle avait dû contrôler une impulsion qui lui dictait de lui envoyer son poing dans la figure. Mais elle devait donner le change car elle sentait que le comte la gardait à l’œil...


Alors, elle l’avait invité à déguster un Yorkshields de seize ans d’âge et ils firent la causette comme si de rien n’était ou presque... car Cendre avait dû lui assurer, avec le sourire, que la disparition de sa fille ne lui faisait ni chaud, ni froid. Une bonne gorgée de whisky sanguin, oui, ça lui ferait du bien.


- Oh, vous savez, vous m’avez préparée à ce qui allait arriver. Et puis, je ne connaissais pas cette enfant. Je l’ai laissée à son père pendant trois ans. Elle ne représente rien pour moi.


- Je dois admettre que vous me ravissez. Vous êtes décidément la plus compétente pour devenir ma grande maîtresse vampire. Je ne m’étais pas trompé à votre sujet.

- Vous me flattez mais je n’en suis pas encore là. Souvenez-vous que je dois devenir maîtresse vampire d’abord. Et ça fait trois ans que je suis vampire majeure. Je stagne, mon cher.


- Vous devriez reprendre les combats avec Monsieur Vatore. Il m’a fait savoir que vous ne vous entrainiez pas beaucoup. Utilisez-vous vos pouvoirs, au moins ?

- Bien sûr, je fais de mon mieux, Vladi. Nous avons l’éternité, non ?


- Tout à fait. Il n’y a aucune date butoir. Rien ne presse et vous semblez gérer à merveille.

- Alors, vous ne serez pas déçu, mon ami.


Lorsqu’il partit, Cendre sentit la rage monter en elle.


Une rage si forte qu’elle para instinctivement sa forme sombre. Comment avait-il osé venir la déranger alors qu’elle faisait le deuil de son enfant ? Et qui était le responsable de tout ça ?


Cendre déploya ses ailes de chauve-souris et vola jusqu’à la cellule de Dirk.


Elle se jeta alors sans prévenir sur la seule personne responsable de sa tristesse, cet incapable qui n’avait pas été apte à lui donner un petit vampire.


C’était bien la peine de faire le beau et de se sentir supérieur aux autres.

Voilà presque quatre ans qu’elle le supportait et elle se fit plaisir en vengeant l’affront qu’il avait un jour fait subir à Jessie en la traitant de moins que rien.


« Adieu Dirk Dreamer. Repose en paix au paradis des stars. Justice a été faite et Amandine ne méritait pas un père tel que toi, de toute façon. »


Lorsque la Faucheuse en eut fini avec la célébrité, Cendre sentit des larmes couler le long de ses joues.


Des larmes qui n’étaient pas destinées à Dirk mais à sa fille qu’elle ne reverrait plus.

Elle devait se ressaisir avant que Jessie ne la voit dans cet état. Ce n’était pas digne d’une maîtresse.


Mais c’était trop tard. Malgré sa propre peine, Jessie était venue vers Cendre.

- Qu’y a-t-il, Madame ? C’est Amandine, n’est-ce pas ? Vous avez l’air aussi triste que moi.


Cendre s’ingénia à rassurer sa servante.

- Je ne pouvais pas faire autrement. La communauté vampire a les yeux rivés sur moi et, au moindre faux pas, je grille sur la place publique... et toi, Jessie... toi, tu seras donnée en pâture à des vampires assoiffés. Je ne pouvais pas faire autrement.


Jessie avait compris. Elle savait que Madame n’avait pas eu d’autre choix que se plier aux traditions et elle voyait bien que celle-ci en avait le cœur anéanti. Elle lui était reconnaissante d’avoir voulu la protéger, elle, une simple servante.

Alors ce serait elle, Jessie, qui soutiendrait sa maîtresse face aux dures décisions qu’elle aurait à prendre. Elle savait que Madame n’était pas mauvaise.


Jessie s’était alors retirée à la demande de Cendre qui avait besoin de rester seule avec ses pensées, de tristes pensées dont elle voulait se libérer.


Elle se rendit chez Lucas. Il était la seule personne à qui elle aurait voulu confier son désarroi et elle reprit forme humaine pour approcher de son cercueil.


- J’ai perdu ma fille aujourd’hui, Lucas. Est-ce que la vie va ainsi longtemps me priver des êtres que j’aime le plus au monde ?


- Comment as-tu fait ? Tu as élevé toi-même ta fille humaine jusqu’à l’âge de quatre-vingt-dix ans ? Lucas... je ne suis pas digne de toi.


Sa voix s’insinua dans les pensées de Cendre :

- Mon amour... Ta décision a été la bonne... Tu prends les justes décisions... Fie-toi à ton jugement... tu ne le regretteras pas.


C’était la deuxième fois en plus de quatre ans qu’elle entendait la voix de Lucas et, sous l’exaltation du moment, sa forme sombre réapparut.


Lestat le sanguinaire, son Unique amour, lui avait parlé et, grâce à lui, elle savait qu’elle avait fait le bon choix. Il fallait continuer et sa descendance devait voir le jour. Et il était indispensable qu’elle s’y mette sérieusement.




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