J’arrivai ce dimanche-là, en fin d’après-midi, à l’université de Britechester. Je me rappelle encore aujourd’hui avoir été complètement émerveillée par l’architecture grandiose des bâtiments illuminés par le soleil couchant. Sur la place centrale, trônait une majestueuse statue représentant un livre. Je sus, par la suite, que c’était la statue emblématique de cette université. Elle était visible de chaque bâtiment qui entourait la place.
Deux d’entre eux se faisaient face : il s’agissait des deux cités universitaires, le hall Drake et le hall Wyvern.
Je rejoignis donc le Hall Drake, et la petite chambre que je devais partager avec une colocataire. Celle-ci était absente mais elle avait déjà choisi son lit. Le mien serait donc près de la fenêtre avec vue sur la place, ce qui me plaisait beaucoup. Je déposai mes affaires personnelles qui se réduisaient à quelques vêtements et à la photo de mes parents. La pièce me semblait pourtant bien vide. Je ressentis un petit coup de blues. Avais-je bien fait de m’éloigner de tous ceux que j’aimais ?
Après mon installation, j’allai m’asseoir sur l’un des deux bancs qui étaient installés sur la terrasse, afin d’y admirer la vue que j’avais de ma « nouvelle maison ». Cela me remonta un peu le moral, mais je me sentais seule. Mes parents me manquaient déjà.
Je décidai de me changer les idées et d’aller jusqu’à la place pour voir la statue du livre de plus près. J’y rencontrai Stéphane Blanc, un garçon fort sympathique qui avait encore deux semestres à faire avant de quitter l’université. Nous y croisâmes une fille à l’air déprimé, nouvelle, tout comme moi, apparemment.
Stéphane connaissait l’université par cœur. Il me parla des fêtes organisées par le club « Vive Britechester », et de la salle commune du Campus, « le repaire de Darby ».
Il me parla aussi de la bibliothèque du campus, et du pub dans lequel les étudiants des deux universités se retrouvaient, en bonne amitié autour d’un verre, le Pub O ’Poivre. Stéphane était intarissable sur la vie du campus...
...mais il me laissa subitement sans prévenir.
C’est alors que je fis brièvement la connaissance d’un garçon qui se présenta à moi comme s’appelant Daniel Manille. Nous parlâmes un moment. Lui aussi était arrivé depuis peu et était déjà parti à la découverte de sa nouvelle « ville », mais tout comme Stéphane, Daniel s’en alla rapidement.
- J’espère qu’on se croisera à nouveau, Cassandre. A plus ! Je dois filer en cours.
- A plus !
Décidément, les personnes que je croisais, étaient de vrais courants d’air.
J’en profitai alors, pour me rendre au repaire de Darby. L’endroit était désert. Il y avait une grande table, un bureau avec un drôle d’ordinateur et deux pupitres. De quoi étudier dans de bonnes conditions.
La salle commune avait également son petit espace détente, avec un micro...
...et une petite cafétéria, complètement déserte, elle aussi. Ce n’est pas ici que j’allais faire de nouvelles connaissances...
Il y avait un petit jardin extérieur, très agréable, avec vue sur le canal.
Je décidai d’aller y faire un tour. L’endroit était vraiment magnifique. Un péniche y était même au mouillage.
Et j’en prenais plein les yeux avec l’architecture environnante. Mais ce n’est pas encore ici que j’allais rencontrer du monde.
Je me rendis donc au pub dont m’avait parlé Stéphane. C’est là que je fis la connaissance de Jonathan Dumont.
En discutant avec lui, j’aperçus une silhouette qui m’était familière et qui marchait d’un pas décidé.
Jonathan m’invita à venir au pub.
Il m’expliqua que les deux universités se retrouvaient ici après les cours, pour décompresser.
La jeune femme que j’avais aperçue auparavant me fit un signe de la main. Elle m’avait reconnue.
- Je sais que je te connais, lui dis-je, mais je n’arrive plus à savoir d’où...
- La boulangerie de ton père.
- Oh mais oui ! Je me souviens. Tu es une bonne cliente en plus.
- Ça oui. J’y vais presque tous les jours. J’adore son pain.
- Ben ça alors ! Le monde est petit, s’exclama Jonathan.
Elle s’appelait Lilith. C’était une fille un peu excentrique et très sympathique.
Je fis aussi ce soir-là la connaissance de Raphaël Dupont. Raphaël, de même que Lilith, étudiaient à l’Institut Foxbury, l’université rivale de celle de Britechester.
Il m’expliqua que même s’il pouvait y avoir des tensions entre les deux universités lors de certains évènements, le pub, tout comme la bibliothèque, était un peu la zone neutre du campus.
L’endroit était très convivial et tout le monde parlait à tout le monde. C’est aini que je fis la connaissance d’Alexis Laporte et d’Henri Lefebvre, deux amis de Stéphane, qui venait de nous rejoindre.
A la fin de la soirée, Lilith nous proposa à Henri et à moi, de finir la soirée chez elle. C’était l’une des rares étudiantes qui vivait sur le campus en maison individuelle. Les autres étaient en cité U.
Lilith habitait avec sa sœur jumelle, Angela.
Angela, contrairement à Lilith, étudiait à Britechester. Nous avions beaucoup de points communs, notamment, la cuisine, et nous sympathisâmes tout de suite.
Elle était très gourmande, et adorait préparer de bons petits plats à sa sœur, qui aimait manger mais détestait faire la cuisine.
- Je suis très heureuse de vous connaître ta sœur et toi. J’espère qu’on se reverra.
- Mais j’y compte bien. Tu es la bienvenue chez nous.
- Je n’aurais pas mieux dit, confirma Lilith. Tu reviens quand tu veux.
En rentrant, je fis la connaissance de ma camarade de chambre, Emilie Morel. C’est elle que j’avais vu passer un peu plus tôt dans la journée, l’air déprimé.
- Salut, je m’appelle Cassandre.
- Moi, c’est Emilie. Bienvenue au Hall Drake. C’est mon deuxième semestre ici.
- Merci. Lorsque je suis arrivée tout à l’heure, j’avais l’impression d’être seule. Il n’y avait personne dans les couloirs....
- Tu ne vas pas te sentir seule bien longtemps.
- En général, la journée, tout le monde est en cours ou vaque à ses occupations préférées. Mais le soir, tout le monde est là. C’est là que tu aimerais être tranquille, mais tu ne l’es jamais.
- Ah bon ?
- Les chambres sont des lieux de rencontre. On y entre comme dans un moulin. L’intimité est quelque chose que personne ne connait ici. Mais tu verras, on y passe de très bons moments.
- J’ai hâte de voir ça.
- En attendant, tu peux me dire où sont les douches ?
- Première porte à droite quand tu sors de la chambre. Mais je te conseillerais de prendre ta douche dans la journée. C’est plus tranquille.
En voyant les douches, je compris tout de suite pourquoi Emilie m’avait fait une telle suggestion. Il n’y avait aucune porte, pas même une petite paroi vitrée, pour espérer se dérober à la vue d’autrui. Il fallait se doucher, là, sous le regard de tous... Je ne m’attendais pas du tout à ça.
J’examinai les lieux. Il n’y avait personne. J’étais peut-être arrivée à la bonne heure... De toute façon, je n’avais pas le choix. J’avais pris ma dernière douche la veille au soir. Il fallait que je me lave.
A peine avais-je commencé à faire couler l’eau, qu’une fille entra dans les sanitaires et me salua comme si de rien n’était.
- Salut ! Tu es nouvelle, c’est ça ?
- Euh... oui.
- Je m’appelle Alexandra.
- Moi, c’est Cassandre.
Je ne me retournai même pas pour lui parler, tant j’avais honte. Je l’entendis se brosser les dents puis s’en aller. Ouf. Quel stress ! Il fallait que je me rince très vite, et que je sorte de là.
J’avais presque terminé lorsque j’entendis deux voix masculines derrière moi. Il ne manquait plus que ça !
En une vitesse record, je coupai l’eau et me rhabillai. J’étais vraiment mal à l’aise. Que faisaient des garçons, ici ?
Sans même les regarder, je pris un pas décidé pour retourner vers ma chambre. Il me fallait dormir maintenant.
- Et ben dis donc ! Elle n’a même pas dit bonjour !
- Elle avait l’air pressée...
Mais au lieu de cela, je commençai à m’avancer sur l’un de mes cours, afin d’être au taquet demain matin. Nous avions reçu tous nos livres, et surtout nos cahiers de devoirs, comme on les appelait ici, dès notre arrivée. Je ne voulais pas perdre de temps. J’étais ici pour travailler. J’avais enfilé mon pyjama et m’étais installée au bureau.
Mais il était très difficile de se concentrer avec toutes ces allées et venues dans la chambre. Emilie m’avait pourtant prévenue tout à l’heure. Je fis la connaissance de Jonathan Moreau.
- Salut ! Je m’appelle Jonathan.
- Salut. Je m’appelle Cassandre.
- Et bien, tu es plus polie que tout à l’heure.
- Comment ça ? C’est la première fois que je te vois.
- Nous nous sommes croisés dans les sanitaires tout à l’heure. J’étais avec Daniel.
- Tu étais dans les sanitaires ?
- Oui. Je t’ai reconnue grâce à tes petites couettes rousses, parce que tu nous as complètement ignorés.
- Oui, et bien je préfère oublier ce moment très gênant, tu vois. Je ne savais pas que les douches étaient mixtes.
- Oh, tu vas t’y faire. On n’y fait même plus attention.
- Et puis quoi encore ! le contredit Emilie.
- Pourrions-nous parler d’autre chose que de ces douches ?
- Si tu veux. Tu étudies quelle matière ?
- Les arts culinaires, comme tu peux le voir.
- Tout comme moi ! Nous allons souvent nous voir dans ce cas ! Et si tu as besoin de tuyau, n’hésite pas.
Raphaël venait d’entrer dans la chambre, ce même garçon que j’avais vu plus tôt au pub.
Henri entra à son tour, celui-là même qui était chez Angela et Lilith avec moi.
- Salut les gars ! Cassie, Emilie...
Nous n’aurions bientôt plus de place pour recevoir tout le monde...
Ce soir-là, je fis aussi la connaissance d’Inès Bourdon, habitante du hall Drake et mixologue au Pub O ’Poivre.
- Bonsoir tout le monde. J’ai fini le boulot. Je viens bosser avec vous.
Inès s’était installée sur le lit d’Emilie (c’est d’ailleurs à l’université que j’ai appris que les lits pouvaient servir de sièges), et Henri et Emilie continuaient à diverger sur leur rendez-vous manqué. Et moi, je prenais beaucoup de plaisir à discuter avec Jonathan. Je le trouvais plein de charme derrière ses petites lunettes.
- C’est toujours comme ça ? lui demandai-je.
- Oui. Si tu veux travailler, je te conseille la bibliothèque, ou un banc quelque part sur le campus. Tu y seras plus au calme.
- Je saurai m’en rappeler.
Mes premiers cours commencèrent dès le lendemain.
A la sortie, j’y retrouvai Marc Mignot, un de mes colocataires et Alexandra François, celle qui était venue se brosser les dents alors que j’étais sous la douche.
Marc resta discuter avec moi alors qu’Alexandra s’en fut rapidement. Elle faisait partie de l’équipe de foot et devait aller s’entraîner. Je la trouvais très musclée pour une femme. Et elle était adorable.
Après les cours, je filais à la bibliothèque pour travailler. Je ne voulais pas revivre la même situation qu’hier, en révisant dans ma chambre. C’était tout bonnement impossible. Lilith était là, aussi concentrée que moi.
Jonathan (Dumont) et un autre étudiant qui se présenta comme s’appelant Georges Saurel, vinrent travailler avec nous.
Après mes révisions, je m’isolai pour appeler Papa et Maman.
- Oui, tout va bien. J’adore mes profs. Là, j’ai fait mes devoirs à la bibliothèque... Parce que c’est plus calme que dans la chambre.
- Maman... Je t’assure tout va bien... Oui... Je vous aime... Embrasse Papa.
