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Chapitre 22 - Malveillances

Cendre et la Vallée Oubliée


Malgré le complot sous-jacent qui menaçait le comté de Forgotten Hollow et le duché de Riverview, la vie s’écoulait doucement dans la Vallée Oubliée.

Cendre et Lucas se voyaient fréquemment et Louise, très discrète, profitait de ces moments pour s’éclipser et nettoyer la crypte.


Jessie avait repris du service auprès de Cendre après ses dix jours de congé, suite à son mariage et elle se régalait toujours autant d’enseigner aux enfants de sa maîtresse, même s’ils se chamaillaient parfois à propos des coutumes vampiriques.

Elle se faisait également joie de reprendre la cuisine pour les prisonniers, même si parfois elle avait davantage envie de se nourrir d’eux, surtout lorsqu’ils étaient de la trempe de cette Kayla Flemming qui lui rappelait beaucoup Dirk Dreamer...

Mais Jessie se faisait toujours un honneur de ne jamais toucher au garde-manger de Madame Valrose sans y avoir été invitée, son mari, Caleb, se chargeant lui-même de ramener un repas chaud à la maison.


La milice surveillait de près les agissements de Livinghell et de sa bande mais n’avait rien noté de remarquable durant les quelques mois qui s’étaient écoulés, rien qu’ils ne savaient déjà, en tous cas, et leurs réunions avec le Comte, auxquelles étaient chaque fois conviées le Duc, ne duraient jamais bien longtemps.


Ils avaient également assigné chacun des leurs pour être de faction devant les portes de la Vallée mais aucune nouvelle apparition de vampire n’avait été signalée depuis l’arrivée du dernier, il y a presque quatre ans.


Lorsqu’elle connut un peu mieux Louise, Cendre s’entendit avec Lucas pour que sa servante soit au service de la chapelle les nuits où Cendre venait visiter son amant.Ainsi, les enfants n’étaient jamais seuls, Jessie profitait de Caleb, Bella n’était plus sollicitée, et les deux amants jouissaient de leur tranquillité chez le duc.


C’est un soir comme celui-là que Cendre ressentit les premières contractions annonçant son accouchement imminent.

- Je ne peux pas accoucher chez toi, Lucas ! Si cela se savait, nous serions démasqués.

- Ça n’a pas l’air de se commander, ce genre de choses... Que comptes-tu faire ?


Cendre avait alors traversé la place séparant le domicile de Lucas de la chapelle, et avait réussi à atteindre, tant bien que mal la cellule d’Axel Gageure, pour mettre fin au travail de l’enfantement qui lui causait tant de douleurs.


Le père n’avait pas l’air enchanté , mais, grand bien lui fasse, il ne pourrait faire autrement que s’occuper de sa fille...


Oups... correction... de ses enfants, car Cendre avait mis au monde, pour la deuxième fois, des jumeaux, une fille et un garçon qu’elle prénomma Aliénor et Alaric.


À mesure que le temps passait, Jessie s’alarma de la santé des nourrissons. Elle retrouvait souvent, dans la cellule d’Axel Gageure, des biberons non entamés et des paquets de couches inutilisés.


Elle avait alors plusieurs fois nourri elle-même les jumeaux et les avais changés, constatant de gerçures profondes sur leurs petits derrières fragiles...


Elle avait alors signalé à sa maîtresse le manque d’implication de son prisonnier dans le soin apporté aux bébés, et le sang de Cendre n’avait fait qu’un tour.


Suite à cette conversation, elle s’était rendue, sans attendre, dans la cellule d’Axel :

- Jessie m’a dit que tu ne t’occupais pas des bébés...

- Et je n’ai pas l’intention de la faire. J’aspire à autre chose. Je n’ai jamais voulu de ces mioches ! Que Jessie s’en occupe si ça lui chante !


- Je te laisse une semaine pour changer de comportement. Si tu ne t’occupes pas de mes petits, tu le regretteras...

- Et tu feras quoi ? Je ne vois pas ce qui pourrait être pire que d’être enfermé ici. Même la mort serait plus douce. Je ne changerai pas d’avis.


Une semaine plus tard... Jessie avait dû s’employer, relayée par Louise, à veiller sur les jumeaux, à les nourrir et à soigner leurs érythèmes, pour remettre les petits d’aplomb.

A la fin de l’ultimatum, Cendre avait envoyé Axel Gageure dans une cellule du garde-manger, loin de ses enfants, puis s’en était nourrie.


- Mais qu’est-ce que tu as fait ? lui avait-il demandé alors que les effets de l’hypnose se dissipaient.


- Je tiens la promesse que je t’ai faite la semaine dernière. Tu vois, Axel, on ne touche pas à mes petits... Et c’est la grosse erreur que tu as faite... Tu te demandais ce qui pourrait être pire que ta vie dans ma cellule de géniteur ? Et bien, tu vas vite le savoir !


Cendre avait ensuite fait installer les bébés dans sa chambre. Etant donné qu’elle avait décidé de mettre en veille sa descendance, celle-ci ne lui serait plus utile avant longtemps et ses petits y seraient bien lorsque Jessie ou Louise viendrait pour les choyer.

Alaric et Aliénor seraient les premiers à jouir d’un confort optimum durant leur tendre enfance, surtout que leur maman avait grand espoir que ses petits soient des vampires, sa première grossesse gémellaire l’ayant comblée sur ce point.


Les trois ans de Clotaire étaient arrivés très vite. Il s’avéra être un petit vampire et Cendre dut se séparer de son père Cameron. Elle vida son esprit de vie puis le transforma pour le remercier de ce cadeau, comme elle l’avait fait avec les géniteurs de Samuel, Isaure et Blanche. Elle appela ensuite Francis Caron pour qu’il prenne en charge le novice.


Cendre avait alors présenté Clotaire au reste de sa fratrie. Blanche était enfin ravie d’avoir un petit frère avec qui jouer, et les deux grands l’avaient accueilli à grand renfort de câlins en se disant qu’ils seraient un peu plus tranquilles à présent puisque leur petite sœur ne les solliciterait plus autant.


Les jumeaux grandissaient et posaient de plus en plus de questions sur leur héritage vampirique. Ce soir-là, avant qu’ils n’aillent se coucher, ils avaient voulu savoir ce que devenaient les bambins qui n’étaient pas des vampires.


- Je vous trouve encore bien jeunes pour vous raconter cela, avait répondu Cendre, mais lorsque vous serez en âge, vous saurez tout.

- Mamounette, avait rétorqué Isaure, on se doute bien que les bébés ne disparaissent pas comme ça. Tu les mets dans le cimetière fleuri au fond du jardin, n’est-ce pas ? On a vu des prénoms sur les tombes.


- Mais qui t’a donné autant de jugeotte ? Ces bébés ne peuvent pas être vos frères et sœurs. Ils sont humains et les humains ne peuvent pas rester parmi nous, sauf les servants, bien sûr.


- T’inquiète, Maman, on le sait bien. D’ailleurs, on n’en aurait pas voulu. Ils n’ont pas leur place ici.

La réponse de Samuel avait profondément blessé Cendre qui se retint de le gifler. Comment un enfant de cet âge avait pu prononcer une telle phrase ? Avait-elle mis au monde un enfant sans cœur ?


 

- Il n’est pas sans cœur, lui avait dit Lestat, la nuit même. C’est un vampire et il raisonne comme tel. C’est tout à fait normal.


- Il souriait... Il souriait en me disant que ses frères et sœurs humains n’avaient pas leur place parmi nous... Je l’ai senti se réjouir, Lucas... Et ce n’est qu’un enfant.

- Les vampires sont tous différents, tout comme les humains. Je suis resté longtemps Lestat le sanguinaire parce que je méprisais les humains, et puis, ma fille est née...


- Tu ne m’as jamais parlé de cette période de ta vie...

- Parce que tu étais humaine lorsque je t’ai connue. Je détestais les humains à un point tel que je ne me contentais pas de boire leur sang.


Lucas continua. Elle décela dans son regard à la fois de la tristesse, mais aussi, peut-être, des regrets. C’était difficile à discerner.

- J’aimais les torturer et les voir souffrir, Cendre, les voir me supplier et m’implorer, leur laissant croire que j’accéderais à leurs demandes mais leur assenant le coup de grâce en les regardant droit dans les yeux... j’adorais ça.


Elle frissonna...

- Et tu n’aimes plus ?

- J’ai changé. Ma fille... Elle s’appelait Geneviève... Je crois que je ne te l’ai jamais dit... Elle était si petite quand elle est née... Sa mère est morte en couches, une humaine.


- Comment as-tu connu sa mère ? ça non plus tu ne me l’as pas dit.

- Cela faisait des années que j’étais coincé ici à Forgotten Hollow. Sa mère a garni mon garde-manger mais elle servait aussi à assouvir mes désirs les plus sombres. Lorsqu’elle est tombée enceinte, j’ai pris soin d’elle, mais c’était trop tard. Tout ce que je lui avais fait subir avant avait eu raison de sa fragile santé, et elle mourut entre mes bras, suppliant que j’épargne le bébé.


- Tu l’as fait, puisque Geneviève est morte à quatre-vingt-dix ans.

- Oui, elle a bien vécu. Elle m’a ouvert les yeux à sa naissance. Ce petit être était de moi. Je ne pouvais pas l’abandonner ainsi après les atrocités que sa mère avait endurées de ma main... J’ai décidé de la protéger pour que personne ne lui fasse ce que j’ai fait à sa mère...


Un long silence s’ensuivit.

- Ton histoire est tellement triste...

- Ainsi va la vie... J’ai changé, je me suis radouci, et puis je t’ai connue... douce et empathique malgré un côté malveillant difficile à cacher.


- Lorsque j’ai croisé ton regard cette nuit-là, chez Vladislaus, je t’ai sentie intrépide et inébranlable. Cendre... tu protèges tes enfants, continue à le faire. Tu as pris toutes les bonnes décisions. Ta malveillance se révèle chaque fois que l’on atteint ta famille ou que l’on t’atteint, et c’est ainsi que je t’aime.


- Quant à Samuel, ne lui en veux pas. Il n’a pas eu la chance de naître humain comme toi et d’avoir été transformé ensuite. Il est né vampire. Un jour, il comprendra, j’en suis sûr.

Les paroles de Lucas avaient apaisé Cendre pour un instant mais elle se promit tout de même de garder un œil sur son fils aîné.


 

Un soir, Cendre avait surpris les jumeaux en train de « jouer » au combat dans le jardin.

Il y a quelques semaines, elle s’en serait amusée...


...mais lorsqu’elle observa de plus près ses deux aînés, il lui sembla bien que Samuel était en train d’entraîner sa sœur et que celle-ci ne savait pas trop comment s’y prendre.

Elle avait beau retourner le problème dans tous les sens, il devenait évident, à ses yeux de mère qu’Isaure se laissait influencer par son frère.


Heureusement, ces démonstrations de force ne duraient jamais bien longtemps et ce fut aussi le cas cette nuit-là. Samuel enlaça sa sœur de tout son cœur puis ils jouèrent un moment sur la balançoire.


Ces jeux d’enfants complètements innocents auraient-ils place dans leurs vies éternellement ?

Cendre sentait que son fils voulait entraîner Isaure sur un sentier où elle ne désirait pas aller mais Isaure avait, depuis toute petite, toujours voulu faire plaisir à son frère.


Cette nuit-là, Cendre constata aussi que les jumeaux sortaient de plus en plus souvent la nuit et qu’ils dormaient plus volontiers en journée. Leurs natures de vampires se révélaient peu à peu et sa fierté de maman s’en trouvait revigorée malgré les inquiétudes qu’elle pouvait avoir.


Heureusement, les bambins ne lui donnaient pas autant de mal pour le moment et Cendre aimait se ressourcer auprès d’eux.


Blanche et Clotaire étaient pour elle une véritable source de joie innocente qui lui permettait d’oublier les écarts de ses aînés, et Cendre s’amusait chaque fois de passer du bon temps avec eux avant qu’ils ne grandissent trop vite.


 

Deux mois plus tard, le Comte Vladislaus Straud rassembla autour de lui les personnes en qui il avait le plus confiance, pour une réunion informelle mais très urgente. Il avait, pour l’occasion, réaménagé le salon afin de tous les accueillir.


Cette nuit-là, on retrouva bien sûr les proches du Comte : Cendre Valrose, Lucas Lestat et Francis Caron...


... mais aussi Lilith Vatore et Timothée Renard.


Vladislaus avait aussi accepté pour la première fois à ses côtés, et de son propre chef, Caleb Vatore dont il ne doutait plus de la loyauté à son égard.

Avaient été conviées également les dernières recrues de la milice straudienne telles que Salim Benali...


... Dina Caliente et Jeb Harris, Jeb étant le plus fiable des trois, et toujours prêt à vouloir aider le Comte dans quelque situation que ce soit.

Le dernier arrivé, Cameron Fletcher, n’avait pas été invité car beaucoup trop instable encore, pour le moment...


Vladislaus Straud leur avait fait à tous un exposé sanglant de ce qui se passait dans les catacombes depuis deux jours.

De nombreux vampires ayant voué un attachement sans faille au Comte et à la Maîtresse vampire avaient été retrouvés morts, brûlés, à la surface des catacombes. Ces vampires de la forêt, vivant à l’ombre des arbres et sous terre avaient succombé de la façon la plus violente qui soit.


Et ce n’était pas tout. Francis Caron poursuivit en déplorant le décès d’une dizaine de vampires, achevés à coups de pieu en pleine poitrine ou retrouvés la nuque brisée parce qu’ils refusaient de se soumettre à une nouvelle autorité.

- Les gens ont peur. Ils ont des enfants. Nous avons déjà caché certains d’entre eux dans les catacombes de la milice. Et d’autres nous demandent encore de les aider. Les catacombes résidentielle et commerciale sont devenues une zone de non droit.


- Comment cela est-il possible, demanda Lucas en se tournant vers le Comte et Cendre. N’aurions-nous pas pu prévoir un tel désastre ?


Cendre le regarda.

- Savez-vous ce que je pense, Monsieur le Duc ? Je crois que votre ami Blaise Williams a réussi à pénétrer dans la vallée. Toutes ces morts ne sont pas anodines et les trois vauriens que nous surveillons ne semblent pas suffisamment audacieux pour accomplir de genre de méfaits provocateurs, en tous cas, pas de leur propre chef.


- Je rejoins votre avis, Madame Valrose. Je suis convaincu que Blaise Williams est arrivé à Forgotten Hollow et il le fait savoir.


Deux nuits plus tard, le temps d’élaborer une stratégie avec Francis Caron, Cendre Valrose et le Comte Vladislaus Straud avaient retrouvé leurs partisans dans la forêt, près de l’une des entrées des catacombes, avec pour objectif de reprendre les lieux de gré ou de force.

Ils savaient tous que certains d’entre eux pourraient y laisser leur éternité mais étaient bien déterminés à empêcher Blaise Williams et ses acolytes de semer la terreur dans la Vallée Oubliée.




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