top of page
  • Photo du rédacteurNathalie986

Chapitre 28 - Espoirs

Cendre et la Vallée Oubliée


Mai 2048, quelques jours après la naissance de Mélusine...

Quelque chose d’inattendu s’était produit à Forgotten Hollow, quelque chose que toute la communauté fut heureuse de saluer et qui ne s’était pas produit depuis plus de vingt-sept ans. Ce fut Isaure qui en informa sa mère alors qu’elle lisait tranquillement dans sa partie de la crypte.


Ce jour-là, Cendre s’était isolée afin de lire le compendium ultime des vampires, le seul ouvrage qu’elle n’avait pas encore lu parmi tous ceux que lui avait laissés Lucas.


Le recueil était rempli d’informations infiniment plus précieuses que ce qu’elle avait lu jusqu’ici.

Elle apprit ainsi que le vampirisme était une malédiction qui datait de plus de mille cinq cents ans.


Le premier vampire, un certain Dracula, dénommé aussi le vampire ultime était autrefois humain mais il avait croisé un jour le chemin d’une sorcière qui avait jeté sur lui une malédiction.

« Deux choses peuvent te guérir », lui avait-elle dit « le remède ultime contre le vampirisme ou une sorcière qui pourra inverser le sort. Mais Dracula ne trouva jamais, ni l’un, ni l’autre et avait fini par abandonner tant il aimait sa nouvelle vie.

Une malédiction... avait-elle pensé, tout cela vient d’une simple malédiction...


Elle en était là de ses pensées lorsqu’Isaure vint tambouriner à la porte puis l’ouvrit.

- Il me semblait avoir dit que l’accès à ma crypte était interdit !

- Maman... je suis désolée mais c’est important. Il faut que tu viennes voir quelque chose.


Elles étaient montées jusqu’à la chapelle où elles avaient retrouvé Samuel, puis ils avaient regardé par la fenêtre. La neige avait complètement disparu... Quelques flocons tombaient au sol mais ils ne faisaient que passer... Cendre n’avait jamais revu ce phénomène depuis son arrivée dans la Vallée Oubliée, il y a presque vingt-huit ans.


Il n’y avait jamais eu de saisons, seulement l’hiver, un hiver qu’elle avait cru éternel.

Les enfants jouaient dans le jardin et semblaient beaucoup s’y amuser. Eux aussi profitaient de cette météo inattendue.


Les jumeaux qui n’avaient toujours connu que la neige depuis leurs venues au monde, avaient une foule de questions à poser à leur mère.

- C’est à cela que ressemblait la Vallée autrefois, Mère ?

- Je ne sais pas, Samuel. Je ne l’ai vue ainsi que le jour de mon arrivée. Il s’est mis à neiger lorsque je suis sortie de chez le Comte et, depuis l’hiver s’est définitivement installé. Mais ailleurs, oui, dans les autres villes du monde, c’était à cela que cela ressemblait.


- Nous avions des saisons... Après l’hiver, nous avions le printemps, puis l’été, et enfin l’automne. Et le cycle recommençait.

- J’ai vu ce genre de paysages dans les livres. Je croyais que je ne les verrais jamais...

- Ce dont tu parles, c’est lorsque tu étais humaine, n’est-ce pas ? J’avais presque oublié.


- Oui, j’ai vécu cela lorsque j’étais humaine, Samuel, et c’était une très belle expérience. Si j’avais pu savoir que j’allais être privée de toutes ces saisons, j’en aurais certainement profité davantage.


- Je me demande à quoi elles pourraient bien nous servir, ces saisons. Nous sommes des vampires et nous craignons tous les trois la lumière du soleil. D’après ce que j’ai lu, l’été peut être très chaud. Nous flamberions à coup sûr.


Les saisons ont toutes leur charme et nous pourrions en profiter la nuit. Tu parlais de l’été... Je peux t’assurer qu’il n’y a rien de plus agréable que la chaleur d’une douce nuit d’été.

- J’aimerais tellement connaître ça, avait espéré Isaure.


A la nuit tombée, Cendre était sortie respirer l’air frais d’une nouvelle saison qui s’annonçait.

Le froid glacial avait laissé la place à une fraicheur revigorante qui remplit Cendre de bonheur.

- Ça faisait longtemps, n’est-ce pas ?


Cendre se tourna vers la voix familière.

- Je n’espérais plus revoir le sol de la Vallée un jour... Je crois que vous avez réussi, Madame Valrose.


- Mais de quoi parlez-vous ?

Cendre avait de plus en plus de mal avec les énigmes du Comte, qu’elle n’estimait plus autant qu’avant.


- De la neige, des saisons, de la descendance de vos petits vampires... J’ai mis ma confiance en vous il y a presque vingt-huit ans et vous ne m’avez pas déçu.

- Pourriez-vous être plus clair, Vladislaus ? Je ne comprends rien à ce que vous me racontez.


Ils étaient allés s’asseoir dans le jardin.

- La vallée n’a pas toujours été enneigée. Elle l’est devenue brutalement à votre arrivée. Autrefois, elle était même très belle et très agréable à vivre. Nous cultivions nos plasmafruits et nos jardins étaient fleuris, et nous devions même ratisser nos feuilles en automne.

- Je ne le savais pas. Personne ne m’a jamais rien dit.


- Toujours est-il qu’aujourd’hui, le printemps tente à se réinstaller dans notre vallée, et c’est grâce à vous.

- En quoi ce phénomène serait-il de mon fait ?


- La neige s’est éternisée le jour de votre arrivée et elle a commencé à fondre le jour de la naissance de votre petite dernière. La boucle est bouclée. Les éléments retrouvent leurs places car votre bébé est un vampire. Je n’ai pas besoin d’attendre ses trois ans pour le savoir. Les éléments nous en donnent déjà la confirmation.

- En êtes-vous sûr ?


- Nous n’avions pas eu un temps pareil depuis votre arrivée ici ! C’est un signe. Vous êtes liée à tout cela. Votre dernière fille est un vampire.

Il n’y a plus qu’à attendre que tous vos enfants aient atteint l’âge de la majorité puis nous organiserons la cérémonie de la descendance. Ensuite, votre héritier sera élu et nous pourrons nous marier. Juste avant, ou le jour même que votre décorum des Grands Maîtres.


Cendre écoutait Vladislaus parler avec enthousiasme de tout ce qui allait être leur futur commun. L’échéance approchait... mais elle, elle pensait à Lucas... Heureusement, il n’était plus là pour entendre ça.


Mais elle voulait savoir... savoir comment il avait fini, et si le Comte était ou non responsable de sa disparition, car, même si elle avait ses propres convictions sur le sujet, elle pouvait toujours se tromper.

- Monsieur le Comte..., commença-t-elle

- Monsieur le Comte ? L’heure est donc bien grave si vous m’appelez ainsi...

- Savez-vous ce qu’il est advenu du Duc de Riverview ?

- Oui.


La réponse avait été immédiate et glaçante.

Cendre prit sa tête entre les mains.

« Respire..., respire un bon coup... et surtout, ne lui saute pas dessus ».

« Il faut se maîtriser... »


Lorsqu’elle se fut ressaisie, elle se redressa. Le Comte Vladislaus Straud, quatrième du nom, ne la regardait plus. Le silence s’installa entre eux un long moment avant qu’il ne s’en aille et ne la laisse seule.


Elle avait toujours soupçonné qu’il était l’auteur de la disparition de Lucas, et cette nuit, elle en avait la certitude.

Sa pire crainte s’était réalisée. Elle ne pourrait pas venger Lucas car elle ne pouvait pas tuer Vladislaus. Ils étaient liés l’un à l’autre pour rouvrir les portes de la Vallée.

« Je dois être maudite... »


Isaure choisit ce moment-là pour arriver dans le jardin.

- C’est une bien belle nuit, n’est-ce pas, Maman ?

- Oh oui, avait-elle répondu sans grand enthousiasme.


En s’approchant, elle constata que sa mère avait laissé surgir sa forme sombre.

- Maman ? Qu’est-ce qui ne va pas ?

- Tout va bien, ne t’en fais pas. Je suis un peu nostalgique, c’est tout.


Isaure n’était cependant pas dupe. Elle savait bien que quelque chose de plus sérieux tracassait sa mère. Jamais elle ne revêtait sa forme sombre, à moins d’être très fortement contrariée ou même énervée.

- Ça n’aurait pas à voir avec la photo du Duc de Riverview que j’ai aperçue dans ta crypte ?

Le sang de Cendre ne fit qu’un tour mais elle garda son calme :

- Tu as déjà enfreint les règles en pénétrant dans ma crypte, jeune fille, mais là, tu dépasses les bornes. Laisse-moi seule.


Cela n’avait pas été plus loin. Isaure s’était excusée auprès de sa mère puis s’en était allée, le cœur bien lourd de ne pouvoir soulager sa maman.


Après le départ de sa fille, Cendre s’était rendue dans la forêt, derrière la maison de l’Ail, là où Lucas et elle-même s’étaient promenés tous les deux un grand nombre de fois, à l’abri des regards.


Elle rêva ce jour-là, endormie dans son cercueil, de l’une de ces journées où elle s’apprêtait à se coucher avec Lucas, tous les deux côte à côte, ensemble...

- Tu devrais penser à aménager une crypte pour tes enfants... Ils grandissent et bientôt, ils auront besoin d’un cercueil.


A cette époque-là, Samuel et Isaure n’étaient que des enfants, Blanche et Clotaire, des bambins, et elle ignorait que, seul, Alaric serait un vampire sur sa seconde portée de jumeaux.

Les combats dans les catacombes n’avaient pas encore eu lieu et l’idée lui avait semblé tellement farfelue...

- Un cercueil ? C’est peut-être un peu tôt, tu ne trouves pas ?


Pourtant, aujourd’hui, l’idée ne paraissait pas si absurde que cela. En se réveillant, Cendre avait conduit ses enfants jusqu’à une grande pièce déserte de la crypte. Cette pièce avait été construite, en son temps, par Nathan Livinghell, et les murs commençaient à se fissurer. Le carrelage non plus, n’était pas de toute première jeunesse.

Cendre leur expliqua son projet puis leur demanda ce qu’ils en pensaient.

- C’est crô moche ! s’exclama Alaric.

- Ne t’en fais pas, lui répondit Clotaire, Ce sera très beau quand Maman l’aura arrangée.


Samuel et Isaure se projetaient complètement dans l’ambiance de cette pièce vide, s’imaginant déjà dormir dans leurs propres cercueils. Ils en rêvaient depuis le début de leur adolescence.

- L’endroit s’y prête à merveille, Mère, lança Samuel. On pourra garder ces murs-là ?

- J’aurais mon cercueil aussi ? demanda Blanche.


Cendre était enchantée car, grands et petits, ses enfants avaient adhéré à son projet.


Il ne lui restait plus qu’à faire un tour dans les catacombes et à trouver le meilleur maître d’œuvre disponible pour remplacer Livinghell. Il ne s’agissait pas de décevoir ses enfants.


Cendre n’avait pas trouvé de maître d’œuvre mais avait embauché une décoratrice d’intérieur que tous les vampires de la communauté s’arrachaient. Aurore Dubois était flattée d’avoir été choisie par Cendre, la Maîtresse vampire qui deviendrait assurément leur Grande Maîtresse, et lui promit une belle crypte pour ses enfants.

Elles firent le point sur ce que Cendre désirait avant tout puis elle reconduisit la décoratrice jusqu’à la porte avant de se rendre à la maison de l’Ail.


 

Louise l’avait accueillie en pyjama, ce qui était chose fréquente lorsqu’elle venait la saluer tard dans la soirée.

- Tu ne dormais pas, j’espère ?

- Oh non, j’essayais de faire fonctionner l’ordinateur de mon Maître à grands tours de magie... mais mes pouvoirs ne sont pas assez puissants.


- Pourtant, tu es magnifiquement puissante lorsque tu agis sur mes descendants vampires pour leur ordonner de n’obéir qu’à moi. J’ai testé et cela fonctionne à merveille.

- Il ne s’agit pas du même type de pouvoir.


- Pour moi, tu es extraordinaire. J’ai une question à te poser. Serais-tu capable de lever une malédiction ?


Louise regarda Cendre nerveusement.

- Tout dépend... De quelle malédiction s’agit-il ?

- Le vampirisme.


Elle sembla ensuite soulagée, et même exaltée.

- Oh mais vous m’intriguez, là ! Le vampirisme serait une malédiction ?

Cendre révéla alors à Louise ce qu’elle avait appris en lisant le compendium ultime des vampires et, en n’omettant aucun détail.


- Alors ? Qu’en penses-tu, lui avait-elle ensuite demandé.

- La sorcière qui a jeté une telle malédiction devait être extrêmement puissante. Pour tout vous dire, cette malédiction, si c’en est une, est même déjà bien avancée dans le temps.

Cendre... On ne pourra jamais supprimer tous les vampires existants. Il y en a beaucoup trop. Cette sorcière devait le savoir...

Les vampires sont une race à part entière, de nos jours.


- Je n’envisage pas d’éradiquer toute une race, Louise. Je veux juste savoir comment faire pour ne plus être un vampire.

J’ai déjà une piste avec une potion contre le vampirisme mais je veux connaître toutes les possibilités qui s’offrent concrètement à moi.


Louise s’attrista subitement.

- Vous voulez redevenir humaine ? Mais pourquoi ? Si le Duc revenait, il ne comprendrait pas...

- Le Duc ne reviendra pas, Louise. Il est mort.


Cendre remarqua que la servante de son Unique n’avait pas cillé un instant à l’évocation de la mort de son Maître. Au contraire, elle paraissait vouloir orienter la conversation dans son sens à elle :

- Mais... et s’il revenait quand même ? Après tout, nous ne sommes pas assurées qu’il soit mort. Vous ne pourriez pus être son Unique si vous êtes humaine. Il ne vous entendrait plus... Il courrait à son désespoir... et vous aussi.

- Je comprends ta sollicitude mais je ne suis pas venue ce soir pour te parler du Duc Lestat. Je veux savoir si tu peux rompre cette malédiction.


- En théorie, oui. Je pourrais lever cette malédiction sur un vampire à la fois, bien entendu. Mais en pratique... je n’ai pas du tout le niveau.


- Tu n’as pas le niveau ou tu ne veux pas le faire ? J’ignore pourquoi mais j’ai la fâcheuse impression que tu me caches quelque chose.


Louise avait blêmi puis balbutié :

- Je tiens à vous et à mon Maître, c’est tout... Je ne voudrais pas que vous soyez malheureux.

Cendre avait retenu le temps : la jeune femme s’était exprimé au présent, même en parlant de Lucas. Et puis, elle avait entendu son cœur battre, battre beaucoup plus que de raison...


Cendre sentit la rage monter, une rage indéfinissable qui la submergea. Elle la fixa de son regard :

- Tu es en train de me mentir, Louise, et je n’aime pas ça du tout. Il vaudrait mieux que je sache rapidement de quoi il s’agit.


Elle s’était levée. Elle sentit que la jeune sorcière aurait bien voulu lui révéler ce qu’elle lui cachait mais elle était certainement beaucoup trop troublée pour le faire. Elle décida qu’elle repasserait la voir dans quelques jours.


Quelque chose clochait mais elle n’arrivait pas à mettre le doigt dessus. Est-ce que Louise avait peur ? Mais de quoi, dans ce cas ?

Cendre avait un très mauvais pressentiment.






13 vues

Posts similaires

Voir tout
bottom of page