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  • Photo du rédacteurNathalie986

Chapitre 34 - Un parfum d'apaisement

Cendre et la Vallée Oubliée


Francis Caron était un vampire ancien et Cendre l’avait fait mander car elle l’imaginait capable de savoir que faire, face à la forme squelettique de Lucas.


Francis alla voir de ses yeux l’état du Duc puis il s’installa au jardin avec Cendre. Il lui exposa aussitôt, et sans ambages, que ce qu’il avait vu n’était pas bon signe mais que le Duc n’était pas mort.

- Et que pouvons-nous faire pour qu’il aille mieux ? Va-t-il rester ainsi ?


- Nous avons déjà une chance inouïe qu’il ait survécu à ce traitement après tant d’années mais c’est un Grand Maître, alors cela n’a rien de surprenant. Les Grands Maîtres ont une force qui nous dépasse tous, sauf toi, Cendre puisque tu en es un.

- Venons-en aux faits, tu veux...


- Si tu ne veux pas qu’il succombe, il va falloir l’hydrater avec du sang pour commencer... Et j’entends par là, du sang humain. Oublie les cultures de ta fille.


- Très bien, tout ce que tu veux. Mais comment vais-je le faire boire ? C’est un squelette, Francis !


- Ça va être dur mais il va falloir que tu enduises ses os de ce sang, à l’aurore et à l’aube, toutes les nuits.


- J’ai de l’entraînement. Je viens juste de passer deux heures à nettoyer ses os. Il est mon Unique. Je le veux sauf, et tel qu’il était avant.


- C’est parfait. C’est tout ce que veut la communauté, tout ce que nous souhaitons ; que le Grand Maître ressurgisse de ses ossements. L’espoir va renaître, Cendre ! Puis- annoncer cela à notre peuple ?


- Bien sûr, fais-le ! Je m’adresserai à eux plus tard. Dis-leur que leur Grande Maîtresse va leur ramener un Grand Maître. Explique-leur. Moi, je dois m’occuper de Lucas.


- C’est la meilleure chose que tu puisses faire pour les rassurer. Je vais leur dire que Lestat est ton Unique. Ils sauront ainsi que tu feras tout ce qu’il faut pour qu’il se remette. Tu n’y vois aucun inconvénient, je suppose.


Lorsqu’elle entendit cela, Cendre ne contraria pas Francis. Bien sûr que c’était la meilleure chose à faire pour rallier le peuple... Isaure le lui avait déjà dit après son Decorum des Grands Maîtres.


Francis lui expliqua alors comment procéder une fois que le Duc aurait retrouvé ses chairs. Cendre l’écouta attentivement. Il était vraiment l’homme de toutes les situations.


Durant ce temps, les enfants conversaient dans la salle à manger. Ils avaient même emmené Mélusine pour éviter qu’elle n’arpente les couloirs de la crypte à faire des bêtises.

Samuel leur avait annoncé que l’Unique de leur mère avait été retrouvé, et dans quel état.


- Je trouve ça vraiment triste, avait dit Blanche.

- Moi aussi. Et je n’imagine même pas notre pauvre Maman... lui répondit Isaure.

- Il y a forcément une solution, renchérit le jeune Alaric. Un Unique, c’est comme un jumeau, non ?

- Oui... tu as raison, petit frère, approuva Samuel d’une voix triste.


Clotaire avait alors lancé, d’une voix claire et assurée, qu’il ne servait à rien de s’apitoyer et que la solution serait le sang humain.

- Les vampires n’ont besoin que de lui. C’est une question de logique. Sans sang humain, nous périclitons.


- Je ne suis pas d’accord, avait répliqué Isaure. Le plasma végétal est tout aussi efficace, et j’en suis la preuve vivante. Il est un peu plus contraignant, certes, mais il peut très bien convenir.


Samuel avait alors regardé sa sœur avec le même regard complice que dans leurs jeunes années :

- Tu as raison. Il n’y a pas de bonnes et de mauvaises solutions, et nous avons tous nos convictions et nos façons d’agir. Je ne suis pas meilleur vampire que toi, Isaure. Nous sommes différents, c’est tout.


- Tu reconnais donc que le plasmafruit est une bonne solution ?


- Je n’ai pas dit cela. J’ai juste convenu qu’il fallait se respecter les uns les autres. Si tu préfères le fruit de sang, je ne t’en tiendrai pas rigueur. Je t’aime trop pour ça, mais reconnais, dans ce cas, que je puisse savourer du sang humain. Et puis, honnêtement, je crois que ce sera le seul efficace pour Lestat.


Isaure n’eut pas le loisir de répondre car sa mère venait d’entrer dans la pièce pour constater que ses enfants étaient en pleine conversation autour du sujet « Lucas ». Tous se turent à son arrivée, y compris Mélusine.


Cendre s’était d’abord adressée à ses trois aînés.

- La vie et la mort ne sont pas un jeu de statistiques ou de suppositions, et j’aimerais que vous vous en rappeliez à chaque instant. Nous sommes immortels, oui, mais pas toujours... Notre vie est fragile...

Elle regarda, à ce moment-là, son fils Samuel...


- Notre vie éternelle est précieuse et je viens de m’en rendre compte. Elle est moins fragile que celle d’un humain, il est vrai, mais elle peut disparaître aussi. Il faut que vous en soyez conscients.


Samuel avait baissé les yeux alors qu’Isaure et Blanche désiraient en savoir plus.


Les plus jeunes, eux, faisaient mine de s’intéresser, mais il leur tardait à présent, de vaquer à leurs occupations favorites.


Mais Maman avait remis les choses à leur place :

- Le plasmafruit n’est pas une solution pour Lestat, Isaure, et ton frère l’a justement dit. Tu peux t’en contenter parce que tu es vivante mais il ne suffit pas en cas de « mort vampirique ». Lestat a besoin de sang, de sang humain, le seul qui pourra le ramener à la vie...


Cendre se tourna vers son fils :

- Tu as fait preuve d’empathie cette nuit... en me le ramenant... Tu peux en être fier. Sans toi, je n’aurais jamais retrouvé mon Unique. Tu as tenu ta promesse. Tu sais, en cela, tu ne diffères pas de ta jumelle. Vous êtes les mêmes... Essaye un peu de t’en apercevoir...


Samuel reconnut cette nuit-là, en regardant sa fratrie, qu’ils étaient une grande famille, et il promit à chacun de ses frères et sœurs de faire au mieux pour les aimer tous à l’identique. Cendre s’étonna de ses propos mais elle était tellement heureuse, qu’elle jugea que c’était un bon début...


 


Et Samuel fit des efforts considérables et surtout remarquables pour s’intéresser à la vie de ses frères et sœurs. Il joua régulièrement aux avec Clotaire...


... écouta Blanche jouer du piano et réalisa qu’elle était vraiment très douée...


Il tapa dans le ballon avec Alaric...


... et donna même son bain à sa sœur Mélusine pour découvrir que c’était très amusant.


Samuel reconnut apprécier tous ses moments partagés avec les plus jeunes, mais surtout, il avait retrouvé sa complicité avec Isaure.


Ils étaient jumeaux, mais différents, et il avait compris avec le temps qu’il ne servait à rien de s’entêter à vouloir changer sa sœur, car il ne parviendrait qu’à l’éloigner de lui.


Et il ne prendrait plus jamais le risque de la perdre à nouveau, et encore moins pour une histoire de fruits de sang...


Cette nuit-là, Samuel et Isaure discutèrent beaucoup de l’arrivée du Duc de Riverview dans la crypte. Ils savaient qu’il serait un jour l’époux de leur mère et qu’alors, il partagerait leurs vies.

- Tu en penses quoi, Samuel ?


- Le Duc est un Grand Maître, nous lui devons donc le respect. Et il est aussi l’Unique de Mère. Rien que pour cela, il est important de lui faire bon accueil.

- Je suis d’accord avec toi.



- Et s’il rend Maman heureuse, il sera même le bienvenu. Elle a bien le droit à un peu de bonheur. Je pense qu’il faudrait le dire aux autres, pour s’assurer qu’on est bien tous sur la même longueur d’ondes.


- C’est une très bonne idée mais, de ce qu’ai j’ai constaté, j’ai bien l’impression qu’ils sont déjà d’accord avec nous. Je vais parler aux garçons. Tu te charges de Blanche ?

- Ça marche ! Et si on rentrait maintenant ? Le jour commence à se lever et je n’ai pas envie de finir flambée.


Ses aînés avaient rapporté à Cendre les conversations qu’ils avaient eues avec les plus jeunes, exceptée Mélusine qui n’était pas en âge de tout comprendre, et ils lui avaient assuré que toute sa famille était derrière elle pour la soutenir.



Elle s’occupait matin et soir de Lucas, à enduire ses os de sang humain, sans voir, pour le moment, le moindre signe de changement. Le soutien de sa famille lui était donc indispensable, et savoir que ses enfants faisaient bloc autour d’elle dans cette situation difficile, lui réchauffait le cœur.

- Tu vois, Lucas, je ne suis pas seule à t’attendre. Nous t’attendons tous.


 


Les chairs de Lucas Lestat réapparurent petit à petit grâce aux bons soins de Cendre. Elle constata au bout de plusieurs mois qu’il était redevenu lui-même, bien que considérablement amaigri. Son visage avait repris « forme humaine » et elle avait même cru voir ses paupières bouger.


Une nuit, alors qu'elle l'avait à peine frôlé pour s’en assurer, il eut un mouvement de défense et tenta de cacher son visage.

- Va-t’en ! Ne me regarde pas ! Va-t’en !

Sa réaction la surprit autant qu’elle la peina.


Elle déposa un baiser sur son front et Lucas sembla se calmer.

- M’en aller ? N’y pense pas, lui dit-elle doucement. Je t’ai retrouvé, je te garde, mon amour.


Il avait beaucoup de mal à s’exprimer et son regard vide de désespoir la poignardait jusque dans son âme.

- Je... je ne suis plus... pareil, s’étrangla-t-il

- Et tu crois sincèrement que c’est cela qui va m’arrêter ? Lucas ! Regarde-moi bien !


Cendre venait souvent s’allonger auprès de son Unique pour veiller sur ses sommeils agités.


Il se réveillait régulièrement en hurlant, en proie à d’horribles cauchemars dont elle ne soupçonnait pas le contenu, et elle passait des heures à tenter de l’apaiser, parfois sans succès.


D’autres fois, elle parvenait à croiser son regard et le sentait se détendre peu à peu au contact de sa main sur sa joue :

- Je suis là, mon amour, je suis près de toi.

Et il essayait de lui conter ce qu’il avait vécu :

- J’étais en Enfer...


- C’est terminé... Tu es chez moi, maintenant... C’est fini, Lucas, je te le promets.

Puis il se rendormait.


Cette année-là, Clotaire devint adolescent.


Cendre se rendait compte que le temps ne leur laissait aucun répit et que le moment approchait, impitoyable, où ses enfants devraient combattre les uns contre les autres.


Dans quatre mois, Samuel et Isaure seraient de jeunes adultes et il lui faudrait prendre une décision concernant les premiers combats... Une lourde décision...



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