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  • Photo du rédacteurNathalie986

Chapitre14 - Du changement dans la crypte

Cendre et la Vallée Oubliée


Cendre avait du mal à réaliser. Samuel et Isaure allaient pouvoir rester avec elle ! Les deux bambins étaient des petits vampires. De merveilleux petits vampires, ses petits vampires, à elle !


Jessie était rayonnante. Elle savait que sa maîtresse aurait besoin d’elle pour s’occuper des deux bambinous et cela l’emplissait de joie. Et pour une fois, les petits ne quitteraient pas la chapelle pour ne plus y revenir.

- Je suis tellement heureuse, Madame ! Tellement !

Caleb, quant à lui, ne disait rien. Il semblait heureux lui aussi mais son regard ne se portait pas sur les jumeaux.


Sur ordre de Cendre, Jessie emmena les jumeaux et se chargea de les faire manger, de prendre leurs bains et de les amuser.

Cendre désirait rester seule avec Jeb.

- Ils sont magnifiques, vous ne trouvez pas ?


Elle regarda alors cet homme qui lui avait donné les deux premiers enfants de sa descendance, cet homme qu’elle ne savait pas encore comment remercier alors qu’il lui avait fait un cadeau inestimable.

- Jeb..., commença-t-elle


Il l’interrompit :

- Je sais, Madame Valrose. Je viens de passer les trois plus merveilleuses années de ma vie avec Samuel et Isaure et vous allez me les enlever... Puis, vous me tuerez, n’est-ce pas ?


- Tu te trompes. Je n’ai aucune envie de te tuer, vraiment aucune.

- Mais votre tradition ? Nos deux enfants sont des vampires...

- Je vais réfléchir à une autre solution. Fais-moi confiance.


Ce même jour, Cendre avait convoqué Nathan Livinghell de toute urgence et l’avait reçu dans ses appartements. Nathan était le maître d’œuvre de la chapelle et de la crypte et rien ne lui faisait peur :

- Deux chambres de bambins et un salon ? Je vous finis ça en deux jours !

- Deux jours ? Tu ne crains pas d’épuiser tes ouvriers à la tâche ?


- Les vampires ne s’épuisent jamais à la tâche mais on peut faire ça en trois jours, si vous préférez, Madame Valrose.

Cendre sentit que l’homme avait détecté une faiblesse chez elle, faiblesse qu’il lui fallait absolument démentir.


- Non. Deux jours, c’est parfait. Si tu m’assures que les ouvriers ne seront pas suffisamment fatigués pour accomplir un travail parfait, parce je veux un travail parfait, alors, ça me va.


Elle avait de toute évidence convaincu son maître d’œuvre.

- Je vous le garantis. Et dans deux jours, vous aurez ce que vous voulez, Maîtresse.

- C’est une très bonne nouvelle. Comme tu l’auras compris, la situation est urgente.

Et elle était vraiment urgente puisque Cendre n’avait prévu aucune chambre pour ses bambins, à part des murs et des pièces dénuées de tout meuble et de tout revêtement de sol ou mural.

L’empressement de Nathan faisait plaisir à voir et elle ne doutait pas que ses ouvriers mettraient encore beaucoup de cœur à l’ouvrage pour contenter leur maîtresse.


Après avoir congédié son maître d’œuvre, Cendre appela Bella sur son talkie-walkie.


Les deux femmes s’étaient retrouvées dans sa chambre et Bella lui avait conté les dernières aventures de sa vie, aventures que Cendre écoutaient toujours avec beaucoup d’émotions. Bella semblait plus heureuse maintenant qu’autrefois et cela la ravissait.

- Alors, cette fois, vous gardez les petits auprès de vous ? C’est une merveilleuse nouvelle !


- Je n’y croyais plus et c’est enfin arrivé ! Il fallait que je te le dise face à face, je te dois bien ça.

- C’est moi qui vous dois tout. Je suis heureuse de vous voir comblée et, surtout, que vous n’ayez pas à subir une nouvelle fois, une séparation déchirante.


Les deux femmes échangèrent encore quelques paroles connues d’elles-seules, puis Bella lui annonça qu’elle devait se retirer. Leurs regards devinrent complices. Cendre comprenait.


Elle enlaça son amie avec bonheur et la laissa partir, le cœur lourd. Elle aurait tellement voulu en savoir davantage sur la vie qu’elle menait à présent.


En attendant que Nathan Livinghell aménage les chambres des jumeaux, Cendre avait installé deux lits pour eux dans sa crypte, près de son cercueil. Elle leur lut une histoire et tous finirent par se coucher.


Le lendemain des trois ans des jumeaux, le comte lui rendit visite, les bras chargés de deux gros paquets. Il avait ramené aux enfants une maison de poupée et un coffre rempli de jouets, qu’ils s’empressèrent d’étrenner immédiatement.


Caleb et Lilith, eux aussi, virent gâter les jumeaux en apportant des peluches ; un ours rose pour Isaure et un monstre orange pour Samuel.

Les bambins étaient vraiment contents de leur journée mais Cendre commençait à trouver que le vestibule était de plus en plus encombré.


Heureusement, deux jours plus tard, l’échéance de Nathan avait été tenue et la crypte s’était agrandie de deux chambres et d’un salon.

Les bambins allaient pouvoir enfin profiter d’un espace dédié à leurs activités.


Cendre passait la majorité de son temps auprès de ses enfants. Elle qui avait grandi sans mère et qui avait été élevée par un père adoptif qui avait commandité sa mort, elle voulait offrir à ses bambins ce qu’il y avait de mieux, et le mieux commençait avec sa présence, à elle.

Isaure pouvait passer des heures à jouer avec la maison de poupée offerte par Vlad.


Et elle aimait beaucoup les histoires que lui racontait sa maman, même si celles-ci faisaient parfois un peu peur.


Isaure venait souvent l’écouter pianoter dans la chapelle et avait toujours un commentaire flatteur pour Cendre :

- Maman, tu zoues cro bien !


Mais, avant tout, la bambinette était une petite charmeuse à qui il était difficile de résister, surtout lorsqu’elle roulait des yeux ou employait son plus beau sourire.


Samuel, lui, était un petit bambin dynamique et, à ses jouets, il préférait de loin la boite à danse de Tonton Caleb. Cendre adorait le regarder hocher la tête au rythme de la musique.


Il ne se passait pas une journée où l’on pouvait croiser le petit coquin dans son plus simple appareil, au détour de l’un des couloirs de la crypte.


Mais ce qu’il affectionnait par-dessus tout, tout comme sa sœur, c’étaient les câlins de sa maman et Cendre n’en était jamais avare. Elle tenait à ce que ses enfant ressentent l’amour qu’elle avait pour eux.


Durant la journée, elle confiait les bambins à Jessie qui les emmenait jouer dehors, car elle était bien consciente que ses petits avaient besoin de prendre l’air.

C’était donc Jessie qui partageait avec eux les promenades en plein jour ou la réalisation d’un bonhomme de neige sous le soleil hivernal, et Cendre avait toujours cette petite pointe de regret lorsque qu’elle les observait tous les trois.


Les jumeaux s’entendaient à merveille et passaient beaucoup de temps dans la chambre l’un de l’autre, à partager des jeux, des babillages et des câlins.


Cendre en était enchantée. Elle n’aurait pu rêver mieux. Qu’est-ce qu’elle les aimait, ces deux-là ! Les moments qu’elle chérissait en leur compagnie, étaient ceux passés durant ces repas de famille qu’elle avait tenu à instaurer chaque soir.

Jessie était toujours de la partie et, heureusement, car cela ne se déroulait pas toujours idéalement. Dans ces moments-là, sa servante parvenait à la calmer, surtout lorsque Samuel le dynamique, jetait sa nourriture sur la moquette.

- C’est la troisième fois, cette semaine ! Franchement, je ne vais pas laisser passer, sinon, il recommencera à chaque fois. C’est intolérable.


Et alors que sa petite sœur (de quelques minutes) s’inquiétait pour lui, Samuel regardait sa mère droit dans les yeux, persuadée qu’elle n’agirait pas contre lui.


- Ce soir, tu seras puni dans ta chambre. Apparemment, tu ne comprends pas lorsque je te dis de ne plus jouer avec la nourriture, alors pas de soirée pour toi aujourd’hui.


- Mais Môman...

- Et il n’y a pas de « mais » qui tienne ! Tu vas aller te coucher. Je n’ai pas envie de passer la soirée avec un petit garçon désobéissant et insolent.


Sa colère n’empêcha cependant pas Cendre de border son fils et de déposer un baiser sur son front avant qu’il ne s’endorme.


Quand elle revint au salon, Jessie avait déjà ramassé la nourriture jetée sur le sol et elle avait entrepris de nettoyer la chaise de Samuel. Sa servante était vraiment une perle.


Les soirées au salon étaient toujours empreintes de convivialité et de bonne humeur, et Cendre se demandait comment elle avait pu passer toutes ces années sans entendre rire autour d’elle ou même rire elle-même. Se enfants lui redonnaient le sourire et la force de continuer à assumer son destin. Ils étaient la vie dans la crypte.


Jessie aussi était tellement heureuse que depuis quelques temps, elle s’était mise au tricot.

- « Il fait tellement froid, dehors ! », avait-elle dit. « Au moins, ils auront chaud à la tête vos petits bouts ! ».


Samuel lui manquait ce soir, alors quand elle le vit franchir la porte du salon avec sa petite mine contrite et désolée, implorant de rester avec elle, Cendre n’eut pas le cœur de refuser.


Au contraire, elle le prit dans ses bras et le serra contre elle, en espérant qu’il aurait compris la leçon.


Après avoir couché ses enfants cette nuit-là, Cendre alla boire sur numéro dix-huit. Elle trouvait la femme de plus en plus faible mais elle s’était déjà servi deux fois aujourd’hui sur numéro onze (qu’il lui arrivait parfois d’appeler Dina, il faut dire qu’elle faisait partie des murs, après toutes ces années), alors elle n’avait pas eu le choix... Vlad pouvait se les garder ses cadeaux, à l’avenir. On n’était jamais mieux servi que par soi-même.


 

Dina Caliente était arrivée dans les cellules de Cendre alors qu’elle n’était qu’une toute jeune adulte. Elle était adulte depuis peu et elle tenait toujours le coup. Elle était là, debout, alors qu’elle avait passé la plus grande partie de sa vie ici.


Cendre lui envoya Nathan Livinghell avec pour ordre de combler les fissures sur les murs et de les repeindre. Il devait également rendre la pièce plus agréable.

- J’ai fait ce que j’ai pu avec le budget que vous m’avez donné. Pourquoi autant d’intérêt pour une humaine ?


Nathan était doué. Il avait peint la cellule de Dina en vert, y avait mis de la moquette au sol, avait accroché quelques affiches et séparé son espace sanitaire avec un paravent.

Cendre, quant à elle, lui avait rapporté quelques livres et un ballon de football, car elle avait su par Jessie que numéro onze faisait autrefois beaucoup de sport.


- Numéro onze a le meilleur sang que je n’ai jamais goûté jusque-là, alors, si j’ai envie de lui rendre la vie un peu plus agréable, j’estime que je n’ai pas à m’en expliquer auprès de toi !

D’ailleurs, sache que si je dois encore justifier mes actes et mes décisions, il se pourrait bien que tu finisses par en payer le prix.

Le bougre s’était finalement platement excusé :

- Bien, Maîtresse. J’espère que vous me pardonnerez ma hardiesse.

- Pour cette fois, oui. Mais c’est la dernière.


Cendre réalisa, après tout cela que son garde-manger était très précaire. Entre numéro dix-huit qui paraissait très faible et numéro onze qui déprimait chaque jour un peu plus, Cendre n’avait plus grand-chose à se mettre sous la dent. L’ancienne cellule de Salim Benali était toujours vide et, prise comme elle l’était depuis les trois ans des jumeaux, elle n’avait jamais pris le temps de lui trouver un remplaçant.


Alors, il lui avait fallu s’entretenir avec Lucas, le seul qui la comprenait et, malgré les années qui s’écoulaient, il était toujours là et il lui « parlait » de plus en plus :

- Sers-toi de tes géniteurs, ma douce, nourris-toi d’eux... Eux aussi peuvent te donner du sang !



Bien sûr ! Il avait raison. Mais pourtant, elle leur avait promis... enfin, « promis » n’était pas le mot exact. Elle leur avait dit qu’elle ne boirait plus leur sang.


Tant pis ! Je deviens trop sentimentale ! Lucas a raison.

Ce soir-là, Cendre se nourrit donc du sang de Salim et s’en délecta.


Puis elle se rendit dans la cellule de Jeb, qui, égal à lui-même, en vint tout de suite aux faits

- Alors, ça y est, c’est la fin pour moi ?

- Pas exactement.

- Comment ça ? Vous ne me tuerez pas ?

- Je t’avais dit que je trouverais une autre solution, tu ne t’en rappelles pas ?


Jeb ébaucha un petit sourire.

- Ne vous en faites pas, Madame Valrose, je connais vos priorités. Dites-moi juste comment vont Samuel et Isaure ?


Egal à lui-même, c’est bien ce que Cendre pensait, avec un regard toujours amical et un ton sans animosité.

- Ils sont merveilleux. Samuel joue un peu avec la nourriture et Isaure s’en attriste mais ils s’aiment et sont si attachants que je peux t’affirmer que nous les avons réussis.


Jeb avait confiance en Madame Valrose. Il sentit à peine qu’elle l’hypnotisait mais, lorsqu’elle s’empara de son cou, il lui sembla que toutes ses douleurs prenaient le large et qu’elles ne reviendraient plus.


Après avoir vidé son esprit, Cendre amorça la transformation du sympathique humain. Elle ne voulait pas le voir trépasser et il était le premier qu’elle désirait voir libre, le premier qu’elle transformait... et elle espérait que ce serait une réussite car elle ne s’était jamais aventurée dans une telle pratique avant Jeb. Mais elle devait reconnaître qu’il le méritait bien.


Elle réussit à le persuader de boire son propre sang. Pour une première, elle s’en tirait plutôt bien et elle savait que Jeb ne serait pas seul pour faire face à sa nouvelle vie. Elle avait déjà contacté Francis Caron pour qu’il prenne Jeb sous son aile et lui apprennent les bases et les valeurs d’une existence vampirique.


Ce soir-là, Cendre rencontra un humain nommé Georges Cahill. Avec ses sourcils bruns et son casque sur la tête, elle n’avait pas soupçonné un instant que cet homme fut un vieil homme en fin de vie... Mais elle n’avait pas le choix, elle ne pouvait pas le laisser fuir. Alors numéro dix-neuf prit place dans le garde-manger.


Après avoir laissé Cahill dans sa cellule, Cendre se précipita vers celle de Salim. Il était temps pour elle de mettre au monde son petit, et celui-là avait l’air pressé de sortir.

Blanche vint au monde cette nuit-là et Cendre l’abandonna à Salim.

- J’espérais un garçon mais cette petite fille est superbe. Elle sera ma princesse. Je vous promets de bien m’occuper d’elle.


Cendre sortit de la cellule... La douleur l’envahissait, puissante, déchirante... Tout le bonheur que les jumeaux lui apportaient au quotidien n’empêchait pas la souffrance d’une séparation avec un autre de ses enfants... Une souffrance incommensurable.




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