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  • Photo du rédacteurNathalie986

G6/ Chapitre 7 - Un bambin sur le campus


Ma vie avec Léandre commença quelques temps après. J’avais quitté la Maison aux ailes sombres pour louer une maison individuelle sur le campus, voisine de celle d’Angela et de Lilith. J’avais avisé Maman que je ne pourrais pas être séparée de mon fils, et déclinais donc sa proposition de garder Léandre alors que je serais à l’UdB. Maman avait alors suggéré de venir ici même pour s’occuper de son petit-fils pendant que je serais en cours. Elle en avait discuté avec Christian, dans mon dos, bien sûr. Ils avaient convenu de se partager la tâche, car Christian, qui suivait un cursus en informatique, n’avait pas du tout les mêmes horaires que moi. Et Christian en avait parlé à Lilith... (A ce moment-là, je n’avais aucune nouvelle d’Angela)


Je n’y mis aucune opposition. Je voulais être tranquille avec mon bébé, loin des commérages et des « on-dit ». Personne, à part mes amis proches, ne devrait savoir que j’ai un enfant. Et je comptais bien protéger cette maison des inopportuns. Alors, Maman, Christian et Lilith devinrent les garants de ma sérénité.

 

Je profitai donc de mon bébé, mon fils, mon amour, de cet échange unique qu’il y avait entre lui et moi...

 

Ce jour-là, Lilith m’avait appelée. Elle souhaitait que je vienne parler à Angela, qui était revenue sur le campus. « Je n’ai jamais vu deux amies comme vous. Alors, parlez-vous », m’avait-elle dit.

- Angela. Cassie est là. Je vous laisse toutes les deux.

- D’accord. Merci Lilith.

 

- Angela... Il paraît que tu étais enceinte, lui dis-je, ne sachant que dire d’autre.

- Oui... Avant toi... Ma sœur parle trop...

 

- Mais je suis contente qu’elle l’ait fait ! J’en avais marre de garder le secret...

- Mais personne ne te le demandait...

 

- Si, Cassie. On me l’a demandé. Sinon, tu aurais tout su... Depuis le début. Et nous aurions partagé nos grossesses...

- Qui ? Qui te l’a demandé ?

 

Mais, au lieu de me répondre, Angela me conduisit à l’étage... où il y avait deux berceaux...

- Deux bébés... Je voudrais comprendre. Pourquoi ne m’as-tu rien dit ?

- Parce que tu connais le père...

- Ne me dis pas que c’est Jonathan !

- C’est Aldéric.

 

- Aldéric ? Le meilleur ami de mon cousin Corentin ?

- Celui-là-même. Il ne voulait pas que je te parle de ma grossesse.

- Mais pourquoi enfin ? Nous sommes amies, non ? Et je suis aussi amie avec Aldéric.

 

- Je ne sais pas mais il semble très protecteur envers toi. Quand il a su que tu étais enceinte d’un gars qui t’avait plaquée, il m’a dit de ne pas t’en parler, de ne pas en rajouter à ta peine car nous deux, nous formions un couple heureux.

- Je n’ai jamais rien entendu de plus ridicule ! Et depuis combien de temps êtes-vous ensemble ?

 

- Ça fait plus d’un an. De même que Lilith et Corentin.

- Quoi ? Lilith est avec mon cousin ?

 

- Oui. Nous avons rencontré les garçons, un soir au Cuba Libre, et depuis, nous ne nous sommes plus quittés.

- Quelle histoire ! Les deux meilleurs amis avec les jumelles Simpa ! Ils font toujours pareil ces deux-là ! Lilith aussi a un bébé ?

 

- Non. Elle veut d’abord finir ses études. C’est ce que je voulais aussi, mais Yann et Maewenn sont arrivés un peu plus tôt que prévu.

- Angela, peux-tu me promettre de ne plus jamais rien me cacher ? Parce que là, c’est énorme quand même !

 

- Je t’en fais la promesse, Cassie !

 

- Je n’aurais pas dû écouter Aldéric. Nous aurions ainsi pu partager plein de choses pendant notre grossesse.

- C’est certain.

 

- Maintenant, c’est fait, c’est fait. Mais je dirai quand même deux mots à Aldéric, quand je le verrai. Et ne te laisse plus influencer par lui, s’il te plaît.

- Je te le promets !

 

Le berceau de Léandre me suivait partout. Et comme je passais la plupart de mon temps dans le salon, il y venait aussi. J’étais sûre ainsi de pouvoir l’entendre.

 

Mon fils dormait la plus grande partie de la journée, et quand il ne dormait pas, c’était un vrai bonheur de pouvoir communiquer avec lui.

 

Christian était venu voir Léandre dès le lendemain de mon retour sur le campus.

- Alors, tu t’habitues à ta nouvelle vie de Maman étudiante ?

- Il est encore un peu tôt pour le dire, non ?

 

- Mais tu es heureuse, n’est-ce pas ? C’est ton bébé, ta famille ! me cria presque Christian.

- Bien sûr !

 

Son enthousiasme  avait eu raison du sommeil de Léandre. Il se mit à pleurer.

- Oh zut, pardon... Je n’aurais pas dû parler si fort...

- Ce n’est pas grave. Il se rendormira.

 

- Ooh mais qu’est-ce qu’il est mignon !

 

- Allez, viens par ici mon amour, je vais te présenter quelqu’un.

 

- Léandre, je te présente Christian. Vous vous êtes déjà rencontrés à la maternité.

Mon bébé se mit à pleurer de plus belle.

- Il ne m’aime pas, en déduisit Christian.

 

- Pourquoi dis-tu une chose pareille ? C’est un bébé. Il ne sait pas s’il t’aime ou non. Tu sais, ça me fait vraiment plaisir que tu sois passé.

- J’ai hésité. J’avais peur de te déranger.

 

- Tu ne me déranges jamais. Tu devrais le savoir.

- Même avec Léandre ?

 

- Evidemment. Tu fais partie de ceux qui sont les bienvenus ici.

- Tant mieux parce que je voulais savoir si je pouvais passer de temps en temps pour vous voir tous les deux.

- Tu passes quand tu veux.

 

- Non mais je rêve, tu es en train de rigoler. Mais qu’ai-je donc dit de si drôle ?

 

Je ne me lassais pas de regarder Léandre, mais malheureusement, il me fallait aussi travailler. J’avais une dissertation à rédiger pour le semestre.

 

J’avais essayé, à plusieurs reprises, de joindre Jonathan pour lui annoncer la naissance de son fils.

 

Mais rien à faire. Je tombais invariablement sur son répondeur.

- J’ai l’impression que ton père m’a bloquée...

 

Et Léandre grandit. Il se déplaçait de mieux en mieux chaque jour.

 

- Tu veux bien veux ranger tes jouets ? On va chez Mamie tout à l’heure.

- Mamie, oui !

 

Léandre obéissait sans trop de difficulté et rechignais rarement à faire ce que je lui demandais. J’espérais que cela dure.

 

Nous arrivâmes chez Maman, dans l’après-midi.

- Mamounette ! Je suis contente de te voir !

- Ça va ma chérie ?

 

- Et toi mon petit bonhomme, ça va ?

 

- Maman m’a acheté un coffre avec plein plein de zouets !

- Mais c’est merveilleux, ça.

 

- J’ai encore essayé de joindre son père...

- Et ça ne donne toujours rien ?

 

- Toujours pareil. Le répondeur... Et je me suis renseignée auprès de tous ceux qui le connaissaient, mais personne ne sait où il est parti. Je ne sais même pas où le trouver.

 

- Je pense que tu as fait tout ce que tu pouvais...

- Oui, mais il m’aurait semblé normal qu’il soit au courant pour Léandre.

 

- Même si je ne l’aurais jamais repris dans ma vie, cela va de soi.

- Peut-être bien. Mais tu devrais arrêter de le chercher. Tu dépenses ton énergie pour rien. Garde-la pour ton fils. Tu as essayé de le prévenir. Il est aux abonnés absent. Fin de l’histoire.

 

J’avais décidé de suivre les conseils de Maman. Je n’appellerai plus Jonathan.

 

- Coupe la tablette, Léandre. C’est l’heure d’aller au lit.

- Oui, Maman.

 

Un soir, Christian vint nous rendre une petite visite. Il venait souvent, mais c’était toujours un plaisir de le voir.

 

Et je n’étais pas la seule à me faire une joie de sa présence.

- Coucou Chris !

 

- Il parle vraiment de mieux en mieux.

- Ben, ze suis plus grand maint’nant !

 

Christian partageait beaucoup de choses avec mon fils. Il discutait beaucoup avec lui, jouait avec lui, et participait même à son éducation sans s’en rendre compte, lorsqu’il le sermonnait ou lui apprenait qu’il fallait savoir dire pardon, merci ou bonjour.

- Dis-moi Cassandre, est-ce qu’il a été sage ce petit garçon ?

- Oui. Sage comme une image.

 

Cette belle entente entre mon fils et mon ami était due au fait que Christian venait souvent le garder lorsque j’étais en cours. Il lui était même arrivé, deux fois, de s’occuper de Léandre toute une soirée, afin que je puisse sortir avec mes copines et profiter un peu. Ce garçon était vraiment une perle, et Léandre faisait toujours tout pour lui plaire.

- Très bien. Dans ce cas, la prochaine fois que je te garde, nous irons dans un parc avec plein de jeux pour les bambins. Et n’oublie pas ce que je t’ai appris de plus important.

- Obéir à Maman et pas la faire crier.

- C’est exactement ça !

 

Christian prenait vraiment soin de nous, et je me rendais compte que je n’étais plus simplement amoureuse de lui. Je l’aimais. De plus en plus, chaque jour.

- Maman, tu peux pas rester à la maison aujourd’hui ?

- Non, je ne peux pas, mon chéri. J’ai des cours à suivre... Mais Mamie ne va pas tarder.

 

Le visage de Léandre s'illumina :

- Mamie va venir ! Chouette ! M’en rappelais plus.

- Bien sûr qu’elle va venir. Je ne vais quand même pas te laisser tout seul.

 

- Maman ? Tu reviens vite quand même ?

- Oui mon chéri. Je te le promets.

 

Quelques minutes plus tard...

- Les jumeaux se sont mis tous les deux à pleurer lorsque je suis partie. Quelle cacophonie ! Lilith va me maudire lorsque je vais rentrer !

- Léandre, lui n’a pas pleuré, mais je sentais bien qu’il était triste de me voir partir.

 

- Ils le sont tout le temps. Jusqu’au jour où ils comprendront que l’on revient toujours. Le médecin m’a dit que c’était la peur de l’abandon.

- C’est sûr. Ils sont encore si petits. Aldéric vient souvent les voir ?

 

- Oui. Il était avec nous hier soir. Mais aujourd’hui, il travaille toute la journée. J’ai peur que ce rythme-là ne suffise plus, malheureusement.

- Bon les filles, je vais vous laisser, nous salua Christian. Mon cours va commencer.

 

Angela et moi avions encore un peu de temps.

- Je vais quitter le campus, Cassie, me dit-elle.

Je n’étais qu’à moitié surprise :

- Je pensais bien que tu me dirais une chose comme ça, un jour ou l’autre. Mais j’espérais que ce fut le plus tard possible. Heureusement, il me restera Lilith comme voisine.

 

- Lilith aussi s’en va.

Là, j’eus quand même un choc. Avec Christian, elles étaient mes seules amies sur le campus.

- Oh non... mais vous me faites quoi, les filles ?

 

- Aldéric veut que je vienne vivre chez lui avec les enfants. Il vit très mal cet éloignement quotidien de sa famille. Et nous allons nous marier. Il veut officialiser notre union.

- Mais c’est une grande nouvelle ça !

 

- Oh oui. Cela fait un moment que j’attends sa demande.

- Et Lilith ?

 

- Elle va épouser Corentin et vivre avec lui.

- Quand je t’avais dit qu’ils faisaient tout, ensemble !

 

- Oui. Ils ne sont pas jumeaux, mais c’est tout comme !

- On le dirait bien !

 

- Ah bon, il ne veut pas manger ? Ben j’ai une idée !

- J’espère, parce que je viens à peine de finir de nettoyer. Il m’a jeté son assiette de haricots verts par terre.

 

Christian s’éloigna en direction de la cuisine.

- Ne bouge pas, je reviens.

 

Il déposa une assiette de beignets de poulet sur la tablette de la chaise haute.

- Et voilà ! C’est mieux, hein ?

- Oh oui ! répondit Léandre.

 

- Christian... Léandre ne peut pas se nourrir exclusivement de nuggets, voyons !

- Mais il mange ! C’est l’essentiel, non ?

 

- Tu préfèrerais qu’il meure de faim ?

- C’est crô bon !!!!

- Tu crois sincèrement que je vais laisser mourir mon fils de faim, Paris ?

 

- Tu m’as appelé Paris ?

- Tu me cherches, je te réponds !

 

J’adorais ces moments où Christian était là. Ils me donnaient l’impression que Léandre, lui et moi, formions une famille.

Pourtant, je savais qu’un jour, Christian ne viendrait plus. Il aurait besoin d’avoir sa propre famille.


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