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  • Photo du rédacteurNathalie986

Semaine 9

Troisième année - Eté


Après la foire de Finchwick, j’avais déposé Marguerite, et le lama que je venais d’acheter, à la maison. J’avais ensuite rapidement embrassé mes parents puis emprunté le vieux pick-up de Papa pour me rendre au festival de l’amour à San Myshuno.

Rahul m’attendait sur un chemin de pétales de roses. L’ambiance était magique.


Nous nous servîmes de cette boisson colorée qui coulait d’une fontaine aux allures féériques.


Tout ici semblait enchanteur et la boisson m’enveloppa d’une douceur envoûtante. J’eus l’impression de ne plus être la même et de sentir s’envoler toute ma timidité.


Rahul n’avait l’air guère mieux loti que moi, mais lui avait avalé son verre d’une traite.


Nous décidâmes de nous éloigner de la foule ambiante car elle me donnait le tournis... ou alors était-ce cette boisson...


L’inhibition que je ressentais me permit de lui demander pourquoi il était revenu, et il me regarda avec ses grands yeux pétillants que j’espérais plein d’amour pour moi.


- Maman m’a dit qu’elle t’avait vue... Tu lui aurais dit que tu ne m’attendrais pas et que si une opportunité se présentait, tu la saisirais.

- C’est vrai, j’ai dit ça !


- Je n’aurais pas supporté, Thérèse. Je t’aime tant depuis que je t’ai rencontrée au lycée... Je sais que l’appel du monde extérieur était plus fort que tout, mais je n’ai jamais cessé de t’aimer.


Je le regardai alors en le narguant un peu, ce qui n’était pas dans mes habitudes :

- Vraiment ? Alors pourquoi as-tu souhaité vivre ici, à San Myshuno, avec ma meilleure amie ?

- San Myshuno n’était qu’un pied à terre. J’ai aidé Aurélie à payer le loyer de l’appartement, c’est tout.


- Mais je n’y étais presque jamais, continua-t-il. J’ai sillonné différentes parties du monde, et encore ! je n’ai pas tout vu...

- Et tu regrettes ? dis-je en me levant.


- Comment pourrais-je regretter ? murmura-t-il en s’approchant de moi. Le plus beau des trésors se trouve devant moi et je ne veux pas le perdre...


Il s’approcha encore... Il ne parlait plus... Je sentis son souffle sur ma joue...


Quelque chose se passa que je n’aurais su définir... Mes jambes me soutenaient mais, à l’intérieur, tout mon corps semblait s’abandonner à ce précieux instant.


Quelque chose avait changé entre nous... La magie séductrice du festival opérait et nous permettait de nous exprimer sans tabou.


- Je t’aime, Thérèse... Je te l’ai dit tout à l’heure à la foire mais tu ne m’as pas répondu...


- Parce que ta mère était là. Mais oui, je t’aime. Je t’aime aussi depuis notre rencontre... Je t’aime de tout mon être, Rahul.


Rahul m’embrassa alors d’un baiser si doux que je crus m’envoler.


Puis il se produit une chose incroyable, aussi irréelle que l’ambiance de ce festival.

- Je t’ai emmenée ici, Thérèse, pour avoir le courage de te demander une chose très importante. Je n’aurais jamais osé sans ce merveilleux thé...


- Veux-tu être ma femme ? Veux-tu que je partage ta vie à la ferme ? Je suis prêt. Les plus belles choses sont ici, là où tu es, et là où j’ai vécu. Alors, acceptes-tu ?


J’ignore comment sont les demandes en mariage en règle générale, mais je crois que celle de Rahul était la plus belle du monde. J’en frémis encore lorsque j’y pense aujourd’hui...


Bien sûr ! Bien sûr que j’accepte !


Raoul m’embrassa...


...puis me serra une nouvelle fois dans ses bras.


Nous restâmes un moment à nous regarder, sans pouvoir nous détacher l’un de l’autre...


... mais la réalité se rappela à nous et nous savions qu’il était temps de nous séparer. La ferme m’attendait dans quelques heures très peu lointaines et Rahul le comprit.

- Je t’aime, Rahul.

- Je t’aime, Thérèse.


Il me serra à nouveau dans ses bras...


...puis me laissa m’en aller avec regret.


Lorsque j’arrivais à la maison, je planais encore...


Je saisis un maillot de bain dans la commode de ma chambre en prenant grand soin de ne pas réveiller Jeanne puis je plongeai dans la piscine.


Mon rêve semblait ne jamais s’arrêter... Avais-je vraiment vécu ces moments ensorcelants avec Rahul ?


Je me persuadai que oui. La magie n’avait pas été simplement celle du festival de l’amour. Le charme s’était dissipé et j’y croyais encore. Elle nous avait unis.


 

Le lendemain, j’eus beaucoup de mal à me réveiller avant l’aube mais, un bon café et une douche tonifiante parvinrent à me donner la force d’entamer ma journée malgré une nuit très courte.

Je commençais par les travaux de jardinage.


A l’arrière du jardin, je vis que Papa avait terminé l’étable pour les plantes-vaches.


J’étais heureuse de les savoir enfin hors de portée de la curiosité de Jeanne.


Papa avait installé le lama que j’avais acheté la veille dans un abri tout près de celui de Marguerite.

Je décidai d’appeler mon nouveau compagnon Biscuit.


Après m’être occupée de ma vache préférée, je donnai donc ses premiers soins à mon lama, à commencer par le brossage qui le soulagerait de toute cette laine superflue.


Papa n’en revenait pas de voir à quel point j’avais la fibre avec les animaux. Il avait tenté lui-même de s’occuper de Biscuit puis de le câliner mais, à chaque fois, il avait manqué de peu de se faire mordre.


Je fis également, sur Biscuit, un essai avec la nouvelle friandise dont je venais d’apprendre la recette. Son pelage est aussitôt devenu multicolore, ce qui était assez étonnant, mais l’animal avait l’air très heureux de ce petit changement.


Après avoir été ramassé les œufs, nettoyé le poulailler et joué un peu avec mes poules, je m’employai à donner quelques leçons de dressage à Naya qui était toujours ravie de se prêter au jeu et de passer du temps avec moi.


La journée était déjà bien entamée lorsque je retrouvai Maman dans le jardin. Elle se sentait beaucoup mieux et avait eu envie de prendre un peu l’air et de profiter du soleil printanier.

Je lui racontai, encore émue, ma soirée de la veille. Maman était aussi heureuse que surprise à l’annonce de mes fiançailles et elle me questionna, avec un peu d’appréhension, sur l’endroit que nous avions choisi d’habiter après notre mariage.


Nous n’avions pas discuté de ce détail, pourtant important, Rahul et moi, mais je m’empressai de dire à Maman que je ne quitterai pas la ferme.

J’habitais cet endroit depuis toute petite et je n’avais aucune intention de l’abandonner, même pour me marier avec l’homme que j’aimais.

Il faudrait juste que je lui en parle.


La ferme commençait vraiment à avoir de l’allure et il y faisait bon vivre. Lorsque je revois les photos que Maman avait prises de la bâtisse lorsqu’elle est arrivée à Brindleton Bay, il n’y a plus rien de comparable.


Jeanne continuait à me suivre partout et elle s’intéressait à tout ce que je faisais, posant sans cesse des questions.


Je l’autorisai à m’accompagner dans l’antre des plantes-vaches mais elle n’essayait plus de s’en approcher. Lorsqu’elles ouvraient grand leurs mâchoires pour attraper le morceau de viande que je leur tendais, ma petite sœur avait toujours un mouvement de recul, et moi-même, je me hâtais d’ôter ma main avant qu’elles ne l’avalent aussi.

Je me demandais pourquoi on devait absolument grader ses bestioles mais il parait qu’elles sont indispensables à l’écosystème de la ferme.


Ce jour-là, Rahul vint me rendre visite en début de soirée.


Il venait m’inviter à dîner mais Papa nous avait prévu un barbecue familial et je dus donc refuser sa proposition.


En revanche, mon père se fit une joie d’inviter Rahul à partager notre repas, ce qu’il accepta sans se faire prier.


Nous passâmes vraiment une bonne soirée. Il fut principalement question de notre futur mariage, bien sûr, et Papa insista lourdement sur le fait qu’il faudrait que nous vivions à la ferme. Heureusement, Rahul n’était pas homme à s’offusquer facilement et il affirma à mon père qu’il n’avait pas vu les choses autrement, connaissant mon amour pour la ferme et mes animaux.


Après le dîner, nous allâmes, mon fiancé et moi faire un tour dans le jardin.

- Tu es sûr que tu seras heureux de vivre ici, avec moi ? Nous n’en avions même pas discuté.


- Je serai heureux partout où tu seras. Et puis, n’oublie pas que je suis un garçon de la campagne. Je pourrais te seconder activement.


- C’est vrai, mais pour mes parents et ma petite sœur ? Nous allons vivre dans la même maison qu’eux...


- Tes parents sont charmants, et ta petite sœur aussi. Et si ça ne va pas, j’irai faire un tour. Le terrain est assez grand pour pouvoir éviter quelqu’un et la plage est juste en bas.


Nous allions être heureux, c’était une certitude.


Nous finîmes la soirée dans l’eau, à nous éclabousser comme des enfants...


... afin de retarder l’heure fatidique de la séparation. Rahul n’était pas encore parti que je savais déjà qu’il allait me manquer.


Mon père ne rajeunissait pas mais il avait toujours de l’énergie pour jouer avec ma petite sœur. Oh, bien sûr, je voyais que ces petites séances d’amusement le fatiguaient et duraient beaucoup moins longtemps qu’auparavant mais elles restaient tout de même une source joie pour lui, et il donnait beaucoup d’amour à Jeanne.


Ce printemps-là, j’avais décidé de me mettre à faire des conserves. Kim m’avait expliqué la technique et je me lançai aujourd’hui dans la fabrication d’un pot de mayonnaise. Il fallait bien commencer par quelque chose.


Maman était un peu réservée sur le sujet mais je lui rappelai combien cela avait été compliqué cet hiver de manquer d’ingrédients dans le frigo. Nous en avions été réduits à manger presque toujours la même chose.


Je comptais donc faire un maximum de conserves en prévision de l’hiver prochain, et Maman finit par reconnaitre que ce n’était pas une aussi mauvaise idée que cela, après tout.


Je déposai donc fièrement ma première réalisation sur l’une des étagères que Papa avait fabriquées et installées dans la cuisine afin de soutenir mon projet. J’espérais que le temps que j’avais passé sur cette première conserve aurait un heureux résultat.


 

J’avais pris l’habitude de me coucher tôt le soir afin de ne pas me retrouver vaseuse le matin, comme après la soirée que nous avions partagée, Rahul et moi.

Je me levai donc chaque matin, à l’aube pour profiter de la nature avant de commencer ma journée. J’aimais beaucoup faire du point de croix près du moulin...


... mais surtout, j’adorais me promener le long de la plage, y entendre le bruit des vagues et le clapotis des poissons...


... et apercevoir, tout doucement, le jour se lever.


Je pouvais alors commencer ma journée et, ce matin-là, comme d’habitude, je visitais d’abord les poules.


J’eus la bonne surprise de constater que Caramel avait pondu un œuf pouvant éclore et je le mis tout de suite à couver.


J’allai ensuite m’occuper des animaux...


... puis je lançai une préparation de jus de superfruits...


...avant de partir me promener en forêt.

A cette heure de la matinée, on pouvait savourer le silence et sentir encore l’humidité de la nuit dans l’odeur du bois.


J’y croisai, pour la première fois, un lapin noir et blanc. Il me regarda, intrigué puis détala aussi vite qu’il était arrivé devant moi.


Je me mis à le suivre, espérant qu’il me conduirait jusqu’à son terrier, mais il s’arrêta subitement. Peut-être souhaitait-il que l’on devienne amis, tous les deux ?


Mais mon souhait ne fonctionna pas. J’ignore ce que j’ai pu dire ou faire pour effrayer ce pauvre lapin mais il partit si vite, cette fois, que je ne pus le rattraper.


Heureusement, je retrouvai vite mes amis de la volée du vieux Vallon. Mes visites régulières les avaient rendus moins méfiants et certains d’entre eux se posaient même sur ma main.


D’autres encore se laissaient caresser pour mon plus grand bonheur.


Je me laissais souvent prendre par le temps lorsque je me trouvais auprès d’eux. Leur chant était si agréable à écouter et j’avais l’impression qu’ils chantaient pour moi.


Je poursuivis ma promenade dans les ruines de Goupil, émerveillée par la façon dont ses murs tenaient encore miraculeusement debout.


Alors que j’étais en pleine contemplation de ces merveilles architecturales, j’entendis des bruits de pas derrière moi.


Rahul s’approcha de moi :

- Je suis passé à la ferme. Ta mère m’a dit que tu étais à Bramblewood.


Il m’embrassa tendrement.


Oui, je communie avec la nature et j’en admire ses trésors. Tout est si beau ici...


- Tu as raison... Lorsque je vois tout ça, je me demande encore pourquoi j’ai voulu partir si loin alors que j’avais près de moi toute la beauté du monde.


- Tu avais besoin de partir, Rahul... pour t’en rendre compte.


- Et tu sais quoi ? Au milieu de toutes ces merveilles, c’est encore toi la plus belle.

- Tu me flattes, là !


- Ce n’est pas de la flatterie, c’est de l’amour. Je suis fou de toi !

- Et est-ce que le fou serait partant pour un petit dîner à la ferme ? Nous fêtons ce soir les anniversaires de Maman et de Jeanne, et c’est moi qui fais à manger.


- Et ça n’embêtera pas tes parents, tu es sûre ?


- Mes parents t’adorent. Pour eux, tu es déjà de la famille. Alors ? Tu viens ou pas ?


- Plutôt deux fois qu’une !

- Super ! Mon frère et sa femme seront là. Nous pourrons leur annoncer nos fiançailles. Viens à vingt heures.


Je repartis, toute guillerette, pour Brindleton Bay, laissant derrière moi Rahul et la somptueuse forêt de Bramblewood...


... pour investir la cuisine dans laquelle je passai une grande partie de l’après-midi afin de préparer le gâteau et de concocter un bœuf Wellington. C’était une recette délicate que je n’avais jamais faite seule, mais comme c’était aujourd’hui l’anniversaire de Maman, je ne voulais surtout pas lui demander son aide. C’était sa journée.

Papa lui avait d’ailleurs offert une journée au spa en amoureux, pour l’occasion ; une belle idée pour qu’elle puisse se détendre.


Mon bœuf fit l’unanimité et Maman reconnut que j’avais de vrais talents culinaires.

Papa et Maman nous racontèrent avec enthousiasme leur journée au spa. Maman avait été séduite par le service de garderie qu’offrait l’établissement et elle avoua avoir apprécié pleinement ses moments de relaxation auprès de mon père.

Rahul et moi nous regardâmes et nous fûmes silencieusement d’accord pour annoncer notre futur mariage.


Toute la famille se tourna vers nous dès que je pris la parole pour aviser Mathurin et Claire de nos intentions.

Ma petite sœur n’avait pas l’air d’en revenir, Mathurin nous félicita et ma belle-sœur, qui était déjà prête à se porter volontaire pour m’aider dans les préparatifs, nous demanda quelle date nous avions choisie.


Nous n’en avions aucune idée puisqu’une fois de plus, nous n’avions pas abordé le sujet alors, à l’instinct, je définis la fin de l’été, la semaine avant la foire de Finchwick qui clôturerait la saison.

Je sentis sur moi le regard approbateur de Rahul et mes parents avaient l’air enchanté.


Papa nous demanda aussi où nous comptions nous marier mais je lui dis cette fois, honnêtement, que nous ne le savions pas encore et qu’il fallait qu’on en discute tous les deux ; et je devinais que cela n’allait pas être simple car Rahul m’avait appris que Lavina souhaitait organier notre mariage chez elle.

Je détournai donc la conversation pour en revenir aux deux stars du jour, ma mère et ma sœur. Il était grand temps qu’elles soufflent leurs bougies.


Jeanne souffla ses bougies la première et devint une jolie petite fille.


Maman fut la seconde et, tandis qu’elle vaporisait toutes les bougies d’un seul souffle, je commençai à me faire attaquer par les abeilles


Et j’ai l’impression qu’elles ne voulaient pas me lâcher...


Enfin, passons aux deux plus belles de la soirée !


Me concernant, je crois que je vais m’en sortir avec quelques piqûres mais elles n’auront pas gâché ma soirée.


Et quant à Naya, j’ai l’impression qu’elle n’a pas eu le courage d’attendre la fin de la fête.


 

Le lendemain matin, après avoir donné nourri la vache, le lama, les poules et plantes-vaches, je m’échappai vers Bramblewood pour rendre visite aux animaux de la forêt.

J’y croisai aussi le petit lapin noir et blanc. Il n’avait pas l’air très heureux de me voir mais j’avais envie de tenter une nouvelle approche.


Je m’accroupis pour être à sa portée et, lentement, j’avançai ma main vers lui tout en lui parlement tout doucement, pour ne pas l’effrayer.

Je finis par pouvoir caresser la petite bête et restai un petit moment près de lui. Il se régala du lait de Marguerite que j’avais apporté pour me désaltérer puis il fila.

J’étais quand même très heureuse d’avoir réussi à entretenir une petite relation avec ce lapin sauvage.


En rentrant à la maison, j’installai une volée d’oiseaux dans le jardin, tout près des étables de Marguerite et de Biscuit. L’amitié que j’entretenais avec la volée du vieux vallon m’avait donné envie d’avoir la mienne, et je n’y ai pas résisté.


Je ne le regrettai pas car, dès le lendemain matin, j’eus le plaisir de traire Marguerite au rythme mélodieux de leurs petits gazouillis.


Si mes petits oiseaux se portaient comme un charme, ce n’était pas le cas de Naya qui, depuis quelques jours, n’avait pas l’air d’aller très bien.


Je me résignai donc à l’amener jusqu’à la clinique vétérinaire. Naya avait attrapé le syndrome du chien ridicule... La pauvre. Je comprends maintenant pourquoi elle se sentait si mal.


Heureusement, notre vétérinaire de famille a pu arranger ça rapidement et je pus la ramener, guérie et pleine d’énergie, à la ferme.


Ce même jour, l’œuf doré couvé par ma poule dorée avec donné un petit poussin tout jaune et tout mignon que j’appelai Aureo.


Je ne me lassai pas des merveilles que la nature pouvait nous apporter et c’est dans cet esprit que j’allai me présenter à Michael Bell, le gardien des créatures de la forêt pour lui demander quelques conseils pour approcher les animaux de Bramblewood.


Son aide me fut très précieuse et je promis de repasser le voir bientôt pour lui donner des nouvelles.


Je trouvai rapidement à mettre en pratique ce que m’avait enseigné Michael lorsque mon chemin croisa celui d’un beau renard gris qui s’apprêtait à voler dans le poulailler d’une maison avoisinante. Je lui fis tout d’abord peur, sans le vouloir, puis je dus attiser sa curiosité car il s’approcha de moi.


Je me mis à chanter pour lui et il me fit écho.

Les moments que j’ai passé avec ce renard se sont soldés par une belle amitié. Je n’aurais jamais pensé qu’il serait aussi facile de se lier ainsi avec un animal aussi sauvage.


J’appelai mon renard gris, Philou et lui donnai même quelques vêtements que Michael m’avait remis. Il se laissa faire docilement.

J’espérais ainsi pouvoir le reconnaître facilement lorsque je reviendrais dans la forêt.


En continuant ma promenade, je tombai, au détour d’un chemin sur mon petit lapin blanc et noir. Je le soupçonnais de m’avoir observer et d’être venu à ma rencontre. Nous commencions à tisser quelques liens mais le contact était encore parfois difficile.


Pendant ce temps, Papa profitait de l’été et de ses plaisirs.


Maman s’occupait du jardin.


Et Jeanne jouait comme toutes les petites filles de son âge.


J’essayais toujours de soulager Naya et de l’envoyer s’accoupler lorsqu’il y avait un mâle qui passait dans le coin lors de nos escapades, mais il semblerait qu’elle n’attende toujours pas de petits... Je me demande si j’y arriverai un jour.


Papa et Maman s’aimaient toujours comme des fous. Cet amour faisait vraiment plaisir à voir.


Ils avaient offert à Jeanne un petit établi pour jeune scientifique que nous avions installé dans la cuisine et, ma petite sœur s’en donnait à cœur joie avec des expériences de toute sorte.


Maman devait parfois nettoyer derrière elle lorsqu’elle laissait tomber ses flacons mais elle ne faisait jamais autant de bêtises que Naya...


Heureusement, lorsque nous jardinions ensemble, Maman et moi évacuions sainement tous les petits soucis liés à l’entretien de la ferme, et j’adorais jardiner avec elle.


Papa, de son côté, avait aménagé l’aile gauche du moulin en grange. Il aurait été dommage que cette partie-là de la bâtisse n’eut pas été aménagée mais, en plus d’accueillir le foin et la paille, elle finit aussi par servir de débarras pour les objets que nous n’utilisions plus ou ceux que nous ne savions pas où ranger.


Cela avait pris beaucoup de temps à mon père car il n’était plus aussi vif et alerte qu’autrefois mais il avait tenu à faire ça tout seul alors nous n’entendions pas le contrarier.


Ce week-end-là, nous partîmes tous en forêt de Bramblewood pour faire un pique-nique champêtre. Nous avions invité Mathurin et Claire, mais celle-ci était venue seule car mon frère avait, à ce moment-là une présentation semestrielle à préparer.


Mathurin lui avait promis de nous retrouver, s’il arrivait à finir à temps.

Nous passâmes un merveilleux après-midi tous ensemble...


... qui se termina par une baignade dans la rivière. C’est à ce moment-là que mon frère vint nous rejoindre. Il semblait radieux. J’imaginais donc qu’il était satisfait de son travail.


La température de l’air était si chaude que nous restâmes dans l’eau jusqu’en début de soirée afin de profiter de la fraîcheur bénéfique de la rivière. Nous nous allongeâmes ensuite sur des serviettes, heureux d’être tous réunis, jusqu’à ce qu’il fut l’heure pour Claire et Mathurin de nous quitter.


 

Quelques temps plus tard, Maman apprit avec tristesse le décès d’Elsa Moreau, sa meilleure amie, qui était aussi la mère de Claire.

L’enterrement eut lieu le jour de la journée « portes ouvertes » de l’institut Foxbury, à laquelle Mathurin nous avait invités.

Papa et Maman, se faisant un devoir d’assister aux obsèques, Rahul et moi nous y rendîmes sans eux.

Mathurin, qui avait encore des cours ce jour-là, ne put accompagner sa femme qu’il savait entourée de ses deux frères.

Mon jumeau m’encouragea, ce jour-là, à déployer mon stand sur le campus.


Il m’avait dit que les étudiants seraient sûrement friands de produits faits maison et il avait raison. J’ai ouvert ma brocante durant une heure et, durant une heure, le stand n’a pas désempli, ce qui m’a rapporté une recette conséquente.


Mathurin nous fit ensuite visiter le campus que je trouvais très froid et impersonnel. Nous achevâmes notre tour des lieux par la salle commune et celle-ci ne faisait pas exception au reste : trop grande, et trop vide.

Rahul et moi nous regardâmes et je compris qu’il partageait le même avis que moi.


Nous fîmes une partie de ping-pong à tour de rôle puis mon frère nous abandonna pour aller à son cours d’informatique.


Rahul et moi nous essayâmes au jus-pong puis allâmes chercher un café auprès du barista, histoire de tuer le temps.

L’heure et demie passa quand même rapidement et nous quittâmes enfin la salle commune pour aller chercher Mathurin.


Il nous avait indiqué où était sa salle de cours lors de la visite que nous avions faite, mais, toutes les portes se ressemblaient et nous n’étions pas certains de nous trouver devant la bonne.


En effet, Mathurin apparut devant une porte située un peu plus loin.


- Allez, venez avec moi ! On rentre se changer à la maison puis on file au pub. Vous allez voir, on va bien s’amuser !


Je n’étais pas mécontente de quitter cet endroit trop moderne à mon goût, bien qu’il fut situé au milieu des champs.


 

Le pub O’Poivre, lui, n’avait rien de comparable avec l’ambiance glaciale de Foxbury. Une musique celte et avenante nous accueillit dès notre arrivée. Il y avait du monde et l’atmosphère y était chaleureuse.

Un jeune homme était assis au comptoir, et Mathurin se dirigea tout droit vers lui.

- Venez, nous dit-il, je vais vous présenter Oliver.


Le dénommé Oliver se leva pour venir nous saluer. Il se présenta comme étant un ami de Mathurin qui étudiait dans l’université rivale, c’est-à-dire Britechester.

Le garçon était un littéraire d’un abord très sympathique et, apparemment très heureux de me rencontrer.


Mathurin et lui nous dirent se connaître depuis le début du semestre. Ils se sont connus lors d’une soirée inter-universités dans ce même pub et ont tout de suite été amis.

- Enfin, nous sommes amis sauf lorsqu’il s’agit de défendre nos universités, dit Oliver en rigolant. Dans ce cas-là, nous sommes des ennemis impitoyables.


C’est vrai, je trouvais Oliver vraiment sympathique mais, quelque chose me disait qu’il y avait plus que de l’amitié entre lui et mon frère.


Lorsqu’il s’en alla, je laissai Rahul aller discuter avec d’autres étudiants et je pris Mathurin à part.

- Alors, tu m’expliques ?

- Il n’y a rien à expliquer. Je suis un pauvre type qui trompe sa femme. Et tu sais le plus triste dans mon histoire ? Claire est enceinte. Elle me l’a annoncé hier soir.


Je dus mettre une dizaine de seconde pour intégrer ce qu’il venait de me dire. Le problème qui se posait à Mathurin devait être aussi lourd que sa détresse.

- Que comptes-tu faire ?

- Je ne sais pas. Je ne peux pas quitter Claire. Je vais être Papa... je ne sais même pas comment ça a pu arriver...


- Tu rigoles ?

- On a dû faire l’amour seulement cinq ou six fois depuis qu’on est mariés... C’est pas mon truc... Je ne pensais pas qu’il y avait un risque.

- Il y a toujours un risque, même si ce n’est pas ton truc. Que vas-tu faire pour Oliver ?


Mathurin me regarda avec des petits yeux de chien battu :

- Je ne veux pas quitter Oliver. C’est au-dessus de mes forces.

Je compris tout de suite :

- Tu es amoureux ?


- Je l’aime comme un fou. Je n’ai jamais ressenti ça pour personne.


Mon cœur se serra pour lui :

- Alors là, c’est plus grave que ce que je ne pensais...


 

Trois semaines avant la fin de l’été, Maman et Claire m’accompagnèrent à la boutique de mariage pour choisir ma robe.

Claire nous avait annoncé officiellement sa grossesse et elle ne se sentait pas très bien. De plus, elle affichait un air triste que je mis sur le compte du décès de sa maman.

Elle avait tenu à venir avec nous mais je me demandai si c’était vraiment une bonne idée.


Lorsque nous entrâmes dans la boutique, mes craintes se dissipèrent. Claire connaissait bien les lieux car elle y avait elle-même acheté sa robe de mariée. Elle retrouva son sourire et nous guida joyeusement dans la boutique.

J’étais sous le charme de toutes ses belles robes.


Elles étaient toutes plus jolies les unes que les autres mais j’avais une idée précise de la mienne et je ne la voyais pas encore.


J’entraînais Maman et Claire de l’autre côté de la boutique pour voir ce qu’ils proposaient d’autres.


Et c’est là que je la vis. LA robe. MA robe. J’étais en émoi devant cette merveille. C’était celle-là qu’il me fallait. Elle serait parfaite pour devenir la robe de mon grand jour.


Claire et Maman m’encouragèrent à l’essayer.


Elle m’allait comme un gant, et, à voir la réaction de Maman, je sus que je ne m’étais pas trompée. Cette robe serait la robe de mon mariage, du plus beau jour de ma vie.


Maman alla payer la robe en caisse puis nous abandonna. Tout ce shopping l’avait fatiguée et elle avait préféré rentrer à la maison.

Claire et moi nous retrouvâmes à l’étage de la boutique où il y avait une petite cafétéria. Nous nous installâmes sur la terrasse.

Claire arborait de nouveau son air triste et j’en profitai pour lui renouveler mes condoléances pour sa mère.

- Il ne s’agit pas de Maman, me dit-elle. C’est Mathurin.


J’avais toujours eu peur de devoir me retrouver un jour au milieu de leur histoire et voilà que cela arrivait alors que j'aurais voulu me concentrer sur mon bonheur.


- Tu avais raison, il ne m’aime pas. Il ne pourra jamais m’aimer et je sens bien qu’il est malheureux avec moi.

- Tu lui en as parlé ?


- Il voit quelqu’un d’autre. Nous n’en avons pas parlé mais je le sais. Il parle des heures au téléphone et il a ce sourire idiot. Ce n’est pas moi qui fais son bonheur, je ne le ferai jamais. Je n’ai pas voulu en parler devant ta mère mais j’ai demandé le divorce. Il a accepté.


Je savais combien elle aimait mon frère et combien cette décision devait lui coûter.

- Tu es très courageuse. Et pour le bébé ? Comment ça va se passer ?


- Nous allons partager sa garde. Quelle tristesse que cet enfant vienne au monde dans de pareilles conditions. J’aurais dû y penser avant de proposer à ton frère de m’épouser. Ça nous paraissait une si bonne idée à l’époque. Il n'est même pas né que ses parents sont déjà séparés.


Je me retins de lui lancer un « je te l’avais dit ». Claire souffrait suffisamment comme ça et je savais qu’elle devait souvent repenser à cette fois où j’avais essayé vainement de les dissuader de se marier. Il était donc inutile de lui faire une telle remarque, qui aurait été déplacée. De plus, je tenais sincèrement à l’épauler.

- Claire... Si tu as besoin de quoique ce soit, je serai toujours là pour toi, tu sais. Il n’est pas question que tu traverses seule cette épreuve.


- Je vais me débrouiller, ne t’en fais pas. Et même si je quitte ton frère, je sais qu’il sera tout de même là pour m’aider. Je voulais te dire une chose ; nous ne divorcerons pas avant ton mariage. Je ne voudrais pas gâcher la fête. Nous l’annoncerons à tes parents un peu plus tard.


- C’est très gentil. J’imagine combien tout cela doit être compliqué pour toi...

- Je l’ai bien cherché, n’est-ce pas ?


Je m’isolai, ce soir-là, en rentrant, pour téléphoner à Mathurin.

Lui aussi était malheureux et conscient qu’il avait fait une grosse erreur en épousant Claire. Oh bien sûr, il était heureux car il allait pouvoir vivre son amour au grand jour avec Oliver, mais Claire était son amie d’enfance et il lui était insupportable de la faire souffrir.

Je m’installai sur le rocking-chair avec mon point de croix. J’avais besoin de réfléchir. Tout cela était déchirant. C’est en se trouvant confronté à l’amour et à sa force que Mathurin avait basculé. L’amour avait fait son apparition et l’amour était irraisonnable et souvent impossible à vaincre.


Ma famille m’avait rejointe au salon. Maman avait allumé la télé et m’empêcha de vagabonder plus loin dans mes pensées. Comment allaient-ils prendre la nouvelle lorsqu’elle leur serait annoncée ? J’appréhendais surtout la réaction de Papa.


 

Le matin de notre mariage, je récoltai du miel pour la première fois. D’ordinaire, je laissai Papa ou Maman s’en occuper mais, après avoir pris soin du jardin et des animaux, j’avais encore du temps à tuer. Trop de temps, et je ne voulais pas tourner en rond en attendant l’heure de mon mariage. J’étais tellement impatiente.


A quinze heures, tous les invités arrivèrent. Malheureusement, Lavina n’avait pu être là à cause d’une assemblée générale extraordinaire du conseil municipal d’Henford-on-Bagley, mais nous fêterions cela avec elle plus tard.

Papa avait installé l’arche, entre le moulin et l’étable des plantes-vaches, face à la mer. C’était féérique et le temps était avec nous.


Mon impatience n’allait pas tarder à prendre fin. Oh mais qu’est-ce qu’il était beau, mon Rahul !


J’étais tellement hypnotisée par l’homme de ma vie que je ne remarquai pas le visage tendu de mon frère. Je devinais, par contre aisément, la fierté de mon père et de ma mère.


Lorsque Rahul passa l’alliance à mon doigt, je surpris Maman, du coin de l’œil, en train d’avancer sa chaise pour mieux voir... J’étais émue... Cette fois, ça y est !


Nous étions mari et femme !

Ma petite sœur laissa échapper un « bravo » et je réalisai que ce serait à jamais pour le meilleur et pour le pire.


Nous nous embrassâmes sous une pluie de confettis, face à ce phare magnifique qui avait vu un jour l’union de mes parents.

J’étais si heureuse que mon cœur s’emplissait de sensations si fortes que je pensais qu’il allait exploser.


Rahul m’enlaça à nouveau très fort. Ses mots bourdonnaient à mon oreille tant je me sentais ivre de cet instant :

- Je t’aime, ma chérie, je t’aime si fort.


Moi aussi, je l’aimais. Je l’aimais tant. Était-ce celui-ci le plus beau jour de ma vie ? Il me semblait que oui.


Nous mangeâmes le gâteau des mariés puis nous réunîmes autour de la piscine, près du bar.

L’ambiance était festive. Agatha vint me remercier et m’assurer qu’elle n’avait jamais vu aussi belle mariée que moi.


Aurélie, ma meilleure amie depuis l’école primaire, vint à son tour me féliciter tandis que Maman était en joie devant l’arrivée prochaine de son petit fils ou sa petite fille.


Je vis Papa et Mathurin s’éloigner...


Maman ne lâchait pas Claire. Elle était aux petits soins.


Qu’elle était fière et digne, ma belle-sœur. J’admirais la faculté qu’elle avait, connaissant sa situation, à faire bonne figure et à ne laisser rien paraître. C’était une sacré femme.


Plus loin, le ton montait et arrivait jusqu’à nous.

- Papa, je t’en prie...


Mon père cria tellement qu’il fut impossible de ne pas les entendre.

- Comment as-tu osé ?!!! Comment ?!!!

Sa voix tremblait tant il semblait en colère, et Mathurin recula d’un pas devant la violence de son geste.

Nous nous étions rapprochés pour voir ce qu’il se passait.


J’arrivais au moment où le ton de mon père se calma mais où ses paroles frappèrent. Mes jambes ne me soutenaient presque plus... j’étais en train d’assister à un drame sans précédent dans l’histoire de notre famille.

- A partir d’aujourd’hui, tu n’es plus mon fils et j’aime autant te dire que tu n’es plus le bienvenu dans cette maison, alors va-t’en.


Mon cœur s’accélérait. Nous étions tous sans voix.

- Papa... Je t’aime... Ne fais pas ça...


- Va-t’en, t’ai-je dit. Je ne veux plus te voir.

Me frère sembla abdiquer amèrement. Que pouvait-il faire d’autre devant tant d’animosité.

- Très bien. Puisque c’est ton souhait, je m’en vais. Tu me verras plus. Mes penchants « tordus » ne gêneront pas ta vie. Mais je ne reviendrai pas... Jamais.


Je regardai mon père et mon frère, le cœur complètement brisé :

- Ça suffit... réussis-je à articuler d’une voix blanche. Comment avez-vous pu gâcher ainsi le plus beau jour de ma vie ?

Maman ne disait rien. Elle semblait figée.

Claire était restée en retrait, et Rahul m’avait soutenue de sa présence.


Mathurin s’était approché de moi, semblant réaliser que la musique s’était tue et que tous les regards étaient braqués sur notre père et sur lui.

- Comment as-tu pu ? Tes révélations ne pouvaient pas attendre demain ?


- Je ne pensais pas que ça allait se passer comme ça... Je suis désolé, Thérèse...


- Pas tant que moi.


Mathurin prit Maman dans ses bras pour lui dire au revoir.


Comment une telle chose avait-elle pu arriver ? Pourquoi me sentais-je si impuissante à pouvoir arranger la situation ? Je me sentais anéantie...


J’entendis mon frère dire quelque chose à Claire...


Ma belle-sœur lui sourit. Je vis qu’elle ne lui en voulait pas. Et Maman semblait si abattue.


Mathurin embrassa sa future ex-femme puis il partit.


J’entendis mon père souffler un grand coup.


Je leur en voulais tellement à tous les deux pour avoir gâcher mon mariage. Comment oublier un jour ce qui venait de se passer ?

Les invités avaient déserté la fête, préférant rentrer chez eux plutôt qu’assister à une histoire de famille.

Demain, tout Brindleton et Henford seraient au courant du mariage le plus désastreux de l’année. Alors oui, je leur en voulais.


Seule Jeanne ne parut pas faire attention à l’évènement qui venait de se produire. Elle était bien trop occupée à jouer avec Naya.


Après le départ de Mathurin, mon père alla se coucher et on ne le revit plus de la soirée.


Jeanne était partie jouer dans sa chambre, nous laissant seuls, Maman, Rahul, Claire et moi.

- Je suis navrée, les enfants, parvint à articuler ma mère, un tremolo dans la voix.


Claire essaya de la rassurer :

- Ne vous en faites pas, Capucine. Ça va s’arranger, j’en suis certaine.

- Je n’en suis pas si sûre, lui répondit Maman, le regard dans le vague, et si triste.


- Maman... Les choses ne pourront pas rester ainsi indéfiniment. Papa aime Mathurin. Il ne pourra pas rester sans le voir.

Mais je n’en étais pas aussi convaincue que je voulais bien le laisser paraître.


La nuit tomba sur la ferme... Il n’y aurait pas de grand repas, ni de fête, ce soir...


 

Le samedi suivant, jour de la foire aux légumes géants de Finchwik, je testai sur Marguerite mes friandises arc-en-ciel.

Elle était vraiment très jolie, ma petite vache avec toutes ses couleurs.


Ce jour-là, je perdis Brunette et Blanchette, deux de mes poules. J’avais bien vu qu’elles avaient vieilli et malgré une alimentation saine, elles finirent par rendre l’âme.

Deux nouvelles poules, Alba et Gallinette virent les remplacer dans le poulailler.


Nous partîmes, Rahul et moi dans l’après-midi, pour la foire, en emmenant Jeanne avec nous. L’ambiance était très tendue entre Papa et Maman depuis notre mariage et, de mon côté, je n’adressais la parole à mon père que lorsque je n’avais pas d’autre choix.

Il n’était donc pas envisageable qu’il nous accompagnât à la foire, et Maman avait préféré rester, elle aussi à la ferme.


Je présentai ce jour-là une aubergine géante de qualité parfaite et une tarte au chocolat excellente et j’eus la surprise de gagner la première place du concours de légumes géants. J’étais vraiment fière de moi.


En arrivant à la maison, mon joli ruban rouge alla rejoindre les deux rubans dorés que j’avais gagnés pour les concours de plantes et de vache.


Je rentrai aussi, ce soir-là, avec un oiseau de paradis, récompense bien méritée, selon Lavina, pour avoir présenté un aussi beau produit à la foire du village.

Je m’empressai donc d’aller le planter, en espérant que cette plante apporterait un peu de raison et de douceur dans le cœur de mon père. Avec un si joli nom, il ne pouvait en être autrement et l’espoir commença à m’envahir.



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